Elie Wajeman fait le portrait d’un saint laïc perdu dans la nuit parisienne. Vincent Macaigne impressionne, dans un emploi inédit pour lui.
Arte diffusera ce soir, pour la première fois en clair, Médecin de nuit. Un film sorti en juin 2021 au cinéma, qui avait beaucoup plu à Première. Voici notre critique.
Le médecin de nuit d’Elie Wajeman arpente un territoire bien balisé. A chaque coin de rue, on croit apercevoir l’ombre de James Gray, un fantôme du Nouvel Hollywood. Mean Streets, A tombeau ouvert, L’impasse, La Nuit nous appartient... Les références sont là, évidentes, presque trop voyantes. Mais Wajeman assume – c’était déjà le cas dans Alyah et Les Anarchistes, ses deux précédents films. Mikaël, son héros (Vincent Macaigne), est un médecin tiraillé entre deux femmes, qui multiplie les fausses ordonnances de Subutex, autant pour secourir les toxicos en détresse que pour aider son cousin pharmacien (Pio Marmaï), englué dans des trafics de médocs de plus en plus dangereux. Wajeman filme son personnage comme une espèce de saint laïc, un révolté qui s’est donné une nuit pour faire le bilan de son existence et se racheter une conscience. L’unité de temps condamne le scénario à des contorsions pas toujours convaincantes. Mais l’humanisme fiévreux qui propulse chaque scène fait oublier ces maladresses.
Et Macaigne, surtout, impressionne, dans un emploi qu’il n’avait jamais tenu auparavant. Voûté, en rogne, les mâchoires serrées. Très crédible en intello vénère qui casse des gueules avec la même assurance qu’il prend votre carte Vitale. Le poids du fatum, le fardeau des fidélités claniques, la nuit comme promesse de renouveau… On a déjà vu ce film, certes, on le connaît presque par cœur. Mais ce saint en colère qui refuse de tendre l’autre joue, c’est en revanche une silhouette inédite, qui n’appartient qu’à Wajeman et Macaigne. A eux seuls.
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