Ce documentaire en trois parties donne la parole à des enfants qui ont grandi auprès du principal suspect, Arthur Leigh Allen.
"Zodiac est fascinant de la première à la dernière minute. Et il y en a 158", écrivait Première à sa sortie. Le thriller de David Fincher vous obsède ? En 2007, le réalisateur de Seven avait marqué les esprits en retraçant de façon très minutieuse l'une des enquêtes criminelles les plus célèbres de l'histoire américaine. Des plus frustrantes, aussi, puisque le tueur accusé d'avoir assassiné cinq personnes (au minimum) entre la fin des années 1960 et la décennie suivante n'a jamais été arrêté, et ce malgré son jeu avec la police et les journaux de Californie, à qui il envoyait des messages codés, des confessions à décrypter. Les autorités ont bien eu quelques pistes, et un homme en particulier fut suspecté, l'ancien professeur des écoles Arthur Leigh Allen. Mais malgré leurs suspicions à son égard – notamment de la part de l'enquêteur David Toschi, joué par Mark Ruffalo- ils n'avaient pas assez de preuves directes pour l'arrêter une bonne fois pour toutes.
Guillermo del Toro analyse Zodiac, son Fincher préféréAvec C'est le Zodiaque qui vous parle, Netflix promettait de donner une nouvelle lumière sur cette affaire, voire de dévoiler enfin clairement l'identité du Zodiac, près de cinquante ans après ses derniers crimes. Cette publicité choc n'était pas mensongère : en trois épisodes diffusés depuis le 26 octobre sur la plateforme, ses réalisateurs Phil Lott et Ari Mark (déjà derrière Jailbreak : L'amour en cavale pour la même plateforme) apportent en effet de multiples éléments qui, assemblés, laissent peu de doute quant à l'implication d'Allen.
Si leur docu est aussi efficace, c'est grâce à son angle fort, un fil rouge dont ils ne perdent jamais l'objectif : après des dizaines de reportages et d'ouvrages déjà parus sur ce même sujet, This is The Zodiac Speaking donne la parole à des victimes d'Arthur Leigh Allen. Celles-ci relatent tellement de coïncidences liées aux crimes qu'on peine à conserver le bénéfice du doute quant à sa culpabilité. Si ce que confie la famille Seawater est vrai, alors Allen était au minima un sale type, un manipulateur se rapprochant de femmes esseulées pour profiter de leur naïveté, et surtout de leurs enfants. En leur donnant la parole une fois adultes, ceux-ci apportent un regard inédit sur la personnalité de "Lee".
S'il n'y a pas eu de preuve absolue permettant de coincer Allen de son vivant, ces quatre frères et soeurs qui ont vécu une partie de leur jeunesse à ses côtés expliquent avoir retrouvé des lettres très explicites échangées en secret au sein du couple qu'il formait avec leur mère. Ils ont aussi recoupé les dates de quelques "sorties de famille" coïncidant avec les lieux des crimes du Zodiac, et découvert avec stupeur qu'aucun meurtre n'avait été commis par celui-ci durant les années où Allen était enfermé dans un hôpital psychiatrique, pour agression pédophile.
Ces enfants ont attendu la disparition de leur maman, qui a toujours refusé de reconnaître que son ancien amant pouvait être le tueur du Zodiaque, pour fouiller dans ses archives personnelles, ce qui explique les décennies passées entre la mort d'Allen, en 1992, et la sortie de ce documentaire. Ils évoquent aussi dans le dernier épisode leur réaction en découvrant le film de Fincher, il y a 17 ans. Saisis par l'incarnation bluffante du suspect par John Carroll Lynch, en qui il ont cru reconnaître leur ancien beau-père, ils saluent l'obsession pour cette affaire du reporter Paul Avery (Robert Downey Jr.) et du caricaturiste Robert Graysmith (Jake Gyllenhaal) – un homme qui a grandement participé à l'enquête. Lui aussi intervient dans ce docu en racontant sa version des faits, et en soulignant quelques erreurs de la police à l'époque, Allen ayant par exemple été interpellé juste après le meurtre d'un chauffeur de taxi, mais finalement pas arrêté quand il a indiqué qu'il avait "vu le suspect" s'enfuir dans la direction opposée !
Le témoignage de ces enfants est édifiant, même s'ils n'ont pas suivi de façon assidue toute l'affaire du Zodiac. Ils expliquent avoir passé leur adolescence et début de vie d'adulte loin de ces préoccupations criminelles, mais n'avoir jamais complètement coupé les ponts non plus avec Allen, à qui ils ont pu parler -voire qu'ils ont revu- avant sa mort.
Face à des détails troublants du film, ils ont été replongés dans leurs souvenirs d'enfance, comme en voyant la cagoule portée par le Zodiac pour attaquer un couple au bord d'un lac. Un costume fait maison qui ressemblait étrangement à ceux qu'Allen leur apprenait à fabriquer pour ses séances de plongée. En multipliant ce type de "coïncidences", ils ont alors commencé à assembler les pièces du puzzle...
Le documentaire s'arrête aussi sur la fin de vie d'Allen, quand il a été interviewé par une journaliste à qui il assurait ne pas être le tueur, et détaille la pertinence de certains indices découverts après sa disparition. Le décryptage tardif de l'un des fameux messages codés du Zodiac laisse entendre qu'il aurait pu commettre au moins un autre crime sanglant, qui aurait touché directement la famille Seawater. Enfin, l'existence d'une preuve scientifique retrouvée six décennies après ce qui pourrait être l'un des premiers crimes du serial killer est en cours d'analyse. Si l'ADN "parle" enfin, alors il n'y aura plus de doute.
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