Le "vampire" de Marvel, incarné par Jared Leto, manque de mordant.
"Si tu t’attends à de la déception, alors tu ne peux jamais être vraiment déçu", répétait MJ (Zendaya) dans No Way Home. C’est exactement avec cet état d’esprit qu’on abordait Morbius, le troisième film du "Sony's Spider-Man Universe" et première adaptation du personnage de Marvel, 24 ans après son caméo coupé dans Blade. Surtout après avoir vu Venom et sa suite, Venom : Let There Be Carnage, portés par un Tom Hardy en roue libre.
Attention, cette critique contient de légers spoilers sur le film (mais pas sur la fin ni les scènes post-génériques)
C’est aussi avec beaucoup de curiosité qu’on voulait découvrir ce film à la production chaotique, dont le tournage s’est terminé en 2019 et qui n’a cessé d’être repoussé à cause de la crise sanitaire. Curiosité de voir Jared Leto revenir dans un comic book movie, après le souvenir douloureux de son passage en Joker charcuté au montage dans le Suicide Squad de David Ayer. Curiosité de le retrouver tout simplement en tête d’affiche d’un film à gros budget, une première dans la carrière de cette star au profil atypique, généralement cantonnée aux seconds voire troisièmes rôles, d’Alexandre (2004) à Blade Runner 2049 (2017) en passant par House of Gucci (2021). Après tout, c’est ainsi qu’il a décroché un Oscar pour Dallas Buyers Club, en 2014, pour ce qui restera sans doute le pic de sa carrière avec Requiem for a dream.
Leto se resserre
Avec le souvenir de Tom Hardy dévorant un homard vivant dans Venom, on craignait autant qu’on espérait de retrouver un Leto en surjeu total. Il y avait du potentiel avec ce personnage de scientifique qui se transforme en vampire en tentant de se guérir d’une maladie rare grâce à du sang de chauve-souris. Surprise, l’acteur de 50 ans (qui en fait 15 de moins) est étonnement sobre dans la peau de Morbius, peut-être même trop, laissant à son partenaire Matt Smith le rôle du cabotin en chef. L’ancien Doctor Who déclarait il y a quelques jours qu’il ne savait pas trop qui il jouait dans le film. Et ça se voit. Les motivations et l’histoire de son personnage, Loxias Crown, ne sont pas suffisamment expliquées. Ami d’enfance de Michael Morbius souffrant de la même affliction, il s’administre en douce son "remède" et devient aussitôt un monstre sanguinaire, contrairement à Morbius qui tente lui de contrôler ses nouvelles pulsions meurtrières.
Il en va ainsi du film de Daniel Espinosa (Life : Origine inconnue), écrit et monté avec si peu de soin qu’on s’interroge constamment sur la logique des évènements et l’enchainement des scènes qui le composent. Si Jared Harris est correct en mentor, on reste stupéfait devant la romance avec Adria Arjona, qui arrive dans l’histoire comme un cheveu sur la soupe, tandis que le duo de flics mené par un Tyrese Gibson échappé de Fast and Furious brille par son inutilité. Une impression qui nous poursuit jusque dans les easter eggs glissés ici ou là, et les scènes post-génériques, parmi les moins inspirées qu’on ait pu voir dans un film de super-héros (on y reviendra dans un autre papier).
Manquant cruellement d’originalité, y compris dans ses effets spéciaux (du pseudo bullet time en 2022, sérieusement ?), Morbius souffre des mêmes maux que son grand frère Venom. A savoir ceux d’un super villain qu’on maquille en anti-héros, en appuyant grossièrement sur sa dualité et son absence de responsabilité, tout en lui affublant un antagoniste caricatural pour montrer qu’il n’est finalement pas si méchant. Sauf que Venom faisait au moins l’effort de nous divertir en osant le ridicule, là où Morbius se montre désespérément sérieux et pénible.
Commentaires