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La barque narrative est bien chargée, mais un certain doigté technique lui permet de se maintenir à flot. Reste que le propos au demeurant sainement humaniste, s'embarrasse de sous-intrigues parfois laborieuses et pâtit d'une bienveillance à sens unique et un rien monotone qui l'empêche d'accéder au mordant et à la dimension constructive qui auraient fait la différence. On se retrouve ainsi devant un film à l'image de son auteur : sympathique mais manquant de nuances.
Toutes les critiques de Tête de Turc
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Ce film, militant, plus film noir que thriller, unit les codes du polar au constat social. Celui, saisissant et réaliste, d’une banlieue abandonnée, d’un fait divers récupéré par les politiques, de gosses déjà défaits (« les études c’est pas pour les gens comme nous »), de familles blessées. La première réalisation du comédien et scénariste Pascal Elbé met en scène de beaux personnages en souffrance : Elbé médecin compatissant agressé par ceux qu’il soigne depuis l’enfance, Roschdy Zem son aîné surprotecteur, Samir Makhlouf l’adolescent lâché par sa bande, encore un enfant, qui apprend à assumer les conséquences de ces actes, Ronit Elkabetz mère altière et combattive.
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Énième film sur les banlieues, certes, mais qui tient en haleine grâce à la finesse et à la solidité de sa construction. Rivalités entre frères, amour maternel et violence latente envers les femmes racontées par de formidables acteurs donnent, au final, un thriller musclé et efficace.
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Avec intelligence, sans jouer les donneurs de leçon, il empoigne, dans la veine de James Gray, des thèmes poids lourds (...) Du sens et zéro frime, une entrée en matière prometteuse.
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Elbé n'appuie jamais le trait pour décrire des personnages tentant de faire au mieux dans une situation sur laquelle ils n'ont qu'une vue limitée. Le cinéaste, qui joue lui-même la victime, s'est bien entouré: Roschdy Zem, flic vengeur, et Ronit Elkabetz, maman forte, s'effacent devant la révélation du film, Samir Makhlouf, éblouissant dans le rôle d'un enfant confronté à un cas de conscience trop lourd pour lui. La force du film est de le rendre sympathique sans l'excuser. Tête de Turc, œuvre solidement charpentée, vibre en douceur d'une profonde humanité.
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Jouant habilement, et sans forfanterie idéologique, de ce paradoxe, Elbé prend le temps d’être avec ses personnages, leur forgeant ainsi une belle profondeur. Ses “têtes de turc” ont une bonne gueule, avec mention spéciale à ses interprètes féminines – Ronit Elkabetz et Florence Thomassin – en mère courage et mère dépressive, produits d’une intégration avortée.
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(...) oeuvre sobre, forte, noire, empreinte de la violence des banlieues réussit à éviter tous les clichés sur le sujet.
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Remarquablement construit, ce thriller social tricote le destin de ses protagonistes en mailles serrées à les étrangler. Ce filet cinématographique happe le spectateur pour le plonger dans une ambiance et un suspense très particuliers. Il ne fait aucun doute qu'en réalisant, le comédie Pascal Elbé vient de se réaliser.
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On pardonnera à ce thriller au suspens solide, quelques ficelles scénaristiques un peu épaisses, pour applaudir la justesse avec laquelle Pascal Elbé dépeint une réalité sociale souvent caricaturée.
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Un môme tourmenté (Samir Makhlouf), un flic (Roschdy Zem) prêt à tout pour venger son toubib de frère, deux mères blessées (Florence Thomassin et Ronit Elkabetz) : autant de pièces d'un puzzle noir, d'un thriller social sur la banlieue et sa désespérance, mais aussi ses solidarités. Pour sa première réalisation, le comédien Pascal Elbé (qui interprète le docteur) s'est choisi un casting d'amis. Si l'histoire du veuf (Simon Abkarian), un homme rendu fou par la mort de sa femme, semble curieusement plaquée, le film pose un regard chaleureux sur un monde sans repères, où la fraternité semble la seule réponse à la misère et à la violence.
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Pascal Elbé n’a pas choisi la facilité : sa première réalisation n’est ni plus ni moins qu’un drame social sur la France d’aujourd’hui, ses cités où règne la loi du silence, ses générations d’immigrés. Le sujet est d’actualité, le savoir-faire, indéniable, mais le film, comme étouffé par son propos.
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Film choral, Tête de Turc cherche à englober le moral, le social, le politique dans une même intrigue qui décrypterait les complexités de la vie en banlieue dans la France de 2010. Fasciné par les films du mexicain Inarritu dans lesquels se croisent plusieurs histoires apparemment distinctes mais inextricablement liées, il dépeint par exemple la souffrance d'un homme dont l'épouse est décédée faute d'avoir vu arriver à temps le médecin, appelé en urgence... mais inanimé dans sa Golf. Habité par une pulsion de vengeance, ce personnage pousse le final du film vers le thriller.
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Pas bien malin ou simplement grosse faute de goût, Tête de Turc n'est que le décalque d'un cinéma maniant l'esbroufe avec un sérieux aux semelles de plombs. Elbé prenant à la lettre, en fan transi, les travers de son modèle, ce qui est peut-être pire que tout. Alors, oui, son film ne s'arrête pas là. Il a de l'ambition. Celle de photographier la France de son époque, d'installer son récit en banlieue chaude, de tirer sur de multiples fils : médias, politiques, immigration, avec au cœur de son intrigue le souvenir des conflits entre Turcs et Arméniens. Aussi de révéler dans ses sillons de lourdes histoires de familles (d'où Coppola et Gray, soldés), de montrer frontalement les quartiers sensibles, avec leur biotope. Mais à trop charger la barque, et vite, notre Inarritu local survole plus qu'il ne creuse, quand il ne sombre pas dans le ridicule d'une écriture téléguidée (Simon Abkarian, sacrifié en pivot scénaristique). Plus ennuyeux, Tête de Turc a le cul entre deux chaises : en voulant faire un bilan objectif tout en prenant parti, Elbé ne sait plus quel point de vue adopter. Mauvaise influence encore de son dialecticien préféré (Inarritu), se rêvant critique et analyste, humaniste et philosophe, sociologue et tragédien, quand son œuvre n'est que raccourcis et pauvres procédés.