suspiria-2018
Amazon Studios/Capture d'écran YouTube

Sous couvert de revisiter le classique d’Argento, Guadagnino dresse un monument à la gloire de l’admiration qu’il se porte. Et elle est immense.

Suspiria pose l’éternel problème de la pertinence des remakes. Sauf qu’ici, le projet tient bien plus de l’ambition personnelle du réalisateur que de l’habituelle logique des studios qui refont les grands succès pour cibler chaque nouvelle génération. Guadagnino ne cherche pas à plaire aux jeunes. Au contraire, il semble se faire plaisir en assouvissant sa fixation personnelle sur les années 70, déjà présente dans A Bigger Splash, remake arty de La Piscine dont le titre anglophone résumait son ambition d’éclabousser plus fort. Déjà, il se servait du contexte pour glisser, à la limite du hors-sujet, quelques incursions du réel dans la fiction, comme ces migrants dans le paradis de la jet-set. Cette fois, ce sont des survivants du nazisme qui investissent le théâtre d’un étrange ballet de sorcières dans le Berlin de la bande à Baader (cherchez la logique !). On y suit Suzie (Dakota Johnson), débarquant sous l’apparence de la proverbiale débutante dans une troupe de danse d’avant-garde, où elle se fait remarquer par la chorégraphe en chef (Tilda Swinton, insaisissable). Alors que d’autres danseuses disparaissent mystérieusement, l’une d’elles se confie à un vieux psy (Swinton encore, recouverte de latex), dont le rôle prendra une dimension démesurée. Dans un style sombre et surchargé, cinq chapitres entretiennent un épais brouillard narratif avant de déboucher sur un climax pompeux et sanglant, mais qui n’a rien à célébrer sinon l’importance que Guadagnino accorde à sa propre signature. On peut préférer, et largement, l’original.

Suspiria, en salles le 14 novembre 2018