Découvert à Cannes, ce film puissant de la réalisatrice mexicaine Tatiana Huezo est disponible sur Mubi.
Présenté en sélection officielle au Festival de Cannes 2021, ce Prayers for the Stolen (Noche de Fuego) est le premier long-métrage de fiction de la mexico-salvadorienne Tatiana Huezo. Cette dernière était jusqu’ici connue pour ses documentaires. Un travail suffisamment important pour que le festival Visions du Réel ait organisé récemment une rétrospective de son œuvre. On y découvrait notamment son Tempestad où la réalisatrice filmait le témoignage de deux mexicaines dont l’une avait vu sa fille kidnappée par les membres d’un cartel. Ce récit forcément poignant résonne brutalement aujourd’hui avec cette « prière », inspiré librement d’un roman Jennifer Clement, dont l’action se déroule dans un village au Nord du Mexique en proie aux « descentes » régulières des gangs. La caméra de Tatiana Huezo cherche d’emblée à célébrer la beauté du cadre qui s’offre à elle. Le soin apporté à l’image avec une restitution des couleurs étudiée et la délicatesse avec laquelle chaque mouvement est exécuté, peuvent s’envisager comme une rupture esthétique d’une réalisatrice affirmant un changement de cap. Exit donc la forme « chaotique » du documentaire. La fiction, elle, est censée avancer en majesté. Cette pureté virginale, on le devine, sera en partie souillée par le drame à venir. Ainsi la splendeur du lieu de l’action enveloppé de montagnes luxuriantes, contraste bientôt avec la violence la plus crue.
Intimité adolescente
Les premières images montrent des jeunes filles creusant un trou pour y déposer le corps d’une de leur copine visiblement amusée. On verra que ce jeu est en réalité un geste de survie. Une des habitantes vient d’être enlevée, le reste sa famille massacrée. Dès lors, les mères du village vivent dans la crainte de voir, elles aussi, leur enfant disparaître. On retrouve bientôt deux des fillettes du début les yeux embués de larmes, chez le coiffeur. Leurs longs cheveux, devenus soudain encombrants, disparaissent. Les voilà garçonnes. Si on peut reprocher l’esthétisation du récit, la cinéaste en assumant jusqu’au bout ses parti-pris de mise en scène parvient à poser un voile mystérieux. Ce mystère, au-delà des coups de butoirs du réel, est synchrone avec une intimité adolescente qui cherche à s’accomplir envers et contre tous.
Mexique. De Tatiana Huezo. Avec : Ana Cristina Ordóñez González, Marya Membreño, Mayra Batalla… Dispo sur Mubi à partir du 29 avril
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