Elles avaient un potentiel monstre, et pourtant, ces créations originales du géant du streaming ont été jetées à la poubelle.
On se souvient du traumatisme autour de l’annulation de Sense 8 — cette série des Wachowski qui a finalement eu la chance de se clôturer en beauté grâce à la mobilisation de ses fans —, de l’insurrection face aux séries Marvel sacrifiées — The Punisher et compagnie — et plus récemment, de l’abandon de Warrior Nun au bout de deux saisons. La liste est longue et se rallonge. Et comme si ce n'était pas suffisant, Netflix annule le plus souvent ses créations sur des cliffhangers dénués de toute conclusion. Le pire cas de figure reste sans doute celui des séries qui n’ont le droit qu’à une seule petite saison avant d’être aussitôt annulées, pour finir par errer, oubliées, dans les abîmes de la plateforme. De ces séries au potentiel brutalement avorté, voici les 5 qui nous manquent le plus :
I am not Okay with this
La pandémie de Covid-19 a fait des ravages chez Netflix en ébranlant nombreuses de leurs productions, et cette série de Jonathan Entwistle — réalisateur des aventures de James et Alyssa de The End of the F***ing World — en fait partie. Diffusée en février 2020, on y suivait un autre duo de choc, celui de Sydney et Stanley formé par Sophia Lillis et Wyatt Oleff, qui se retrouvaient peu après leur aventure face à Grippe-Sou. Une amitié établie particulièrement palpable à l’écran : l’alchimie de ces deux jeunes qui se découvrent à deux contribuaient largement au charme de cette série, qui nous emmenait dans des recoins inattendus… Car Sydney se décèle rapidement un pouvoir de destruction télékinésique lié à ses crises de colère. Un don empoisonné qu’elle peine à contrôler alors qu’elle navigue sur les émois du cœur : une sublime métaphore du capharnaüm émotionnel de l’adolescence. Mais cet élément surnaturel délicatement amené était un peu trop effleuré pour se contenter d’une seule saison. Pas de bol, on n’aura jamais le fin mot de l’histoire.
Grand Army
Des séries au lycée, il y en a un paquet. Mais comme celle-ci, beaucoup moins. La scène d’introduction annonce de suite la couleur : un état d’urgence dû à un attentat terroriste oblige les lycées d’un établissement de Brooklyn à s’y confiner. Un vacarme dans les couloirs s’en suit et nous présente les protagonistes. Cinq lycéens, cinq points de vue, tous autant éclectiques que profondément impactants, portés par des personnages nuancés et imprévisibles (mention spéciale à Odessa A'zion et sa bouleversante interprétation de Joey). Une série crue et dure, qui explore sans concessions une pluralité de problématiques, du racisme banalisé à l’homosexualité refoulée, en passant par le viol perpétré par des amis ou le harcèlement scolaire. Ces dérives, Grand Army les expose frontalement au spectateur avec une honnêteté cinglante. Une série aux oubliettes depuis sa sortie en 2020, probablement à cause des allégations d'exploitation et d'abus racistes envers la showrunner Katie Cappiello…
1899
Cette série avait tout pour subsister : les créateurs de Dark aux manettes, un superbe casting aux nationalités variées, une trame fusionnant thriller et fantastique. Pourtant, on n’en verra jamais la suite. Et c’est bien dommage, puisqu’il restait encore beaucoup de choses à exploiter des rouages chimériques de ce mystérieux navire, surtout au vu de ce plot twist final rappelant un certaine Matrix... Une annulation plutôt étonnante pour cette croisière haletante qui a su trouver son public, jusqu’à ce qu’une histoire de plagiat vienne entacher la série — l’autrice brésilienne Mary Cagnin a accusé les créateurs de s’être inspirés de sa BD Black Silence. Avec Emily Beecham et Andreas Pietschmann aux commandes, 1899 bénéficie pourtant d’une mythologie particulièrement bien amenée et portée par des visuels à couper le souffle, mais dont le récit aurait mérité une bonne dose d’éclaircissement (que nous réservait sans doute la saison 2). Netflix nous laisse donc penaud, avec nos théories bancales comme lot de consolation.
Drôle
La France a aussi sa dose d’annulations prématurées. Et Drôle, une comédie signée Fanny Herrero — la créatrice de Dix pour cent — en fait partie. Pourtant, cette série dressait au fin fond d’un comedy-club le portrait drôlement touchant d’un quatuor de jeunes artistes de stand-up en quête de succès, mais surtout, en quête de sens. Beaucoup plus série générationnelle que comédie pure où les blagues fusent (même si les passages de stand-up étaient réussis), Drôle mettait en scène Mariama Gueye, Younes Boucif, Elsa Guedj et Jean Siuen, tous plus attachants les uns que les autres. Et la presse était enthousiaste. Les spectateurs aussi. Une deuxième saison était déjà en cours d’écriture. Mais alors, pourquoi ? Selon Netflix, dont les attentes d’audience sont particulièrement exigeantes, les scores de la série n'étaient pas suffisant. Première déçue, la créatrice avait amèrement accueilli la nouvelle dans Télérama : "Il y a des cartons comme Lupin, et c’est très bien, […] et à un autre endroit du spectre il y a Drôle, d’apparence plus modeste, qui propose un regard d’auteur. C’est inquiétant de se dire qu’il n’y a pas la place pour les deux." Une saison 1 qui offrait de belles perspectives pour la suite, avec une fin ouverte qui ne sera finalement jamais fermée.
Lockwood and Co
Dernière en date à avoir été abandonnée par Netflix, cette série de chasseurs de fantômes pour adolescents n’en était pas moins sacrément divertissante. Du surnaturel, une enquête lourde de mystère, trois personnages charismatiques : le tout dans le mixeur, et on obtenait une série aux airs de CW (dans le bon sens du terme). Un univers bien amené et intelligemment construit, qui nous plongeait dans un Londres uchronique envahi de mauvais esprits que l’agence Lockwood & Co, en quête de renommé, se chargeait de prendre en chasse. Surtout, cette série avait réinstauré le slow burn pour ses deux protagonistes amourachés interprétés par Ruby Stokes et Cameron Chapman, à une époque où il est de plus en plus rare que les deux personnages destinés à être ensemble ne le soit pas dès la première saison. Malheureusement, sans saison 2, cela signifie que leur idylle ne sera jamais concrétisée à l’écran. Frustrant.
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