Le grand bain, Halloween, Cold War : les films au cinéma cette semaine
Universal/Gaumont/Diaphana

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

LE GRAND BAIN ★★★★☆
De Gilles Lellouche

L’essentiel
Bien que cerné par les idées noires, Le Grand Bain est un feel-good movie pétaradant.

Le premier film réalisé en solo par Gilles Lellouche a été présenté un peu partout comme un Full Monty à la française. Sur le papier, en effet, c’est un peu l’idée : une poignée de quadras à la dérive font connaissance dans un cours de natation synchronisé et décident de concourir pour les championnats du monde (malgré leur absence manifeste de disposition pour cette discipline).
Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A ADORÉ

HALLOWEEN ★★★★☆
De David Gordon Green

« Fais simple et implacable » : l’unique conseil donné à David Gordon Green par John Carpenter après avoir lu (et approuvé) sa mise à jour d’Halloween. Et tel qu’on connaît le Prince des ténèbres, son unique contribution « réelle » au film, en dehors du score minimaliste au piano rajeuni par ses soins. « Simple et implacable » dit beaucoup de la nature monolithique et prototypale du classique de 1978.
Benjamin Rozovas

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COLD WAR ★★★★☆
De Pawel Pawlikowski

Pawel Pawlikowski n’en est pas à son coup d’essai. Il a passé la majeure partie de sa vie professionnelle en Europe de l’Ouest, et principalement en Angleterre, où il a tourné des documentaires pour la télé. Mais c’est surtout depuis Ida (2013) qu’il s’est imposé comme un cinéaste majeur, comme s’il avait trouvé avec un sujet personnel ce qui lui avait manqué jusqu’alors.
Gérard Delorme

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SIX PORTRAITS XL : JACQUOTTE ET DANIEL ★★★★☆
D’Alain Cavalier

Alain Cavalier est devenu un filmeur. Il a longtemps été un cinéaste, comprendre un auteur signant des films dans un format traditionnel, faits de drames, de joies, de beautés, d’élans romanesques bigger than life… Sans oublier, l’essentiel : des stars (Romy Schneider, Jean-Louis Trintignant, Alain Delon, Catherine Deneuve, Michel Piccoli, Nathalie Baye…)  Le combat dans l’île (1962), L’insoumis (1964), La chamade (1968), Le plein de super (1976) …
Thomas Baurez

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INVASION ★★★★☆
De Shahram Mokri

Appréhender Invasion avec nos grilles de lecture actuelles ressemble au dilemme des spectateurs d’Eraserhead quatre décennies plus tôt : après le choc mental et physique, démêler la contrariété et la fascination, l’hébétude et la confusion, pour décider si oui ou non le futur est en marche. Comme Fish & Cat, précédent long métrage de l’Iranien Shahram Mokri, Invasion est composé d’un seul plan-séquence (avec peut-être une ou deux coupes, mais rien n’est moins sûr). Ce dispositif virtuose, normalement voué à la linéarité, est ici mis au service d’une structure en boucles temporelles, par laquelle les personnages se substituent les uns aux autres pour révéler des événements laissés hors champ. Vous n’y comprenez rien ? Sans doute parce qu’il faut le voir pour le croire. De même qu’il est vain de vouloir résumer le scénario ou circonscrire ses enjeux : un Iran dystopique plongé dans l’obscurité et la brume, une maladie mystérieuse, une équipe de sportifs tatoués au teint blafard (mais quel sport au juste ?), un leader androgyne et son double féminin, une valise à disparition, un tableau d’oiseau en flammes, un stade labyrinthique où s’organise la reconstitution d’un meurtre sous la houlette d’un commissaire taciturne et d’un coupable consentant... L’invasion est avant tout le sentiment produit par le film pour qui accepte de s’y soumettre, qui décide d’accueillir ce cauchemar, qui s’égare dans ce dédale de symboles dont il restera toujours des pièces manquantes. On s’abstiendra volontiers d’utiliser l’adjectif “lynchien”, tout en gageant que le maître en personne avalera sa langue devant cette œuvre hallucinatoire.
Michaël Patin

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PREMIÈRE A AIMÉ

JEAN-CHRISTOPHE ET WINNIE ★★★☆☆
De Marc Forster

Une adaptation en prises de vue réelles des Aventures de Winnie l’ourson signée Marc Forster ? Un projet casse-gueule tant le cinéaste s’était loupé en revisitant l’univers de Peter Pan dans Neverland. Mais quelques minutes suffisent à comprendre que Jean-Christophe & Winnie va transcender le cadre du film pour enfants et déployer un charme qui ne vous lâchera plus. Un mélange des genres que l’on retrouve dans le choix des scénaristes : Allison Schroeder (Les Figures de l’ombre) a mêlé sa plume à celles d’Alex Ross Perry, figure de proue du mouvement Mumblecore, et de Tom McCarthy, réalisateur de Spotlight. Une drôle d’association qui a développé l’histoire de Jean-Christophe, ce gamin qui a passé son enfance entouré de ses animaux en peluche, avant que la guerre ne le métamorphose. Aujourd’hui responsable de la productivité d’une société de bagagerie, son implication dans son travail met à mal l’équilibre de son foyer. Jusqu’au jour où Winnie resurgit dans sa vie et le replonge dans ce temps de l’insouciance et de l’oisiveté. De sa photographie à la colorimétrie joliment délavée et à sa BO cosignée Jon Brion (Lady Bird), une douce mélancolie accompagne ce récit que Forster entraîne vers l’une des composantes majeures du cinéma spielbergien – cette idée de l’adulte qui a oublié l’enfant qu’il était – teintée d’élans à La vie est belle, avec Ewan McGregor en digne héritier de James Stewart.
Thierry Chèze

LA TENDRE INDIFFÉRENCE DU MONDE
 ★★★☆☆
D’Adilkhan Yerzhanov

C’est une histoire vieille comme le monde, celle de l’amour impossible entre une princesse et un roturier. La princesse se nomme Saltanat et possède les traits fabuleux de Dinara Baktybaeva, croisement entre Gong Li et Michelle Yeoh. Le roturier, c’est son ami d’enfance Kuandyk (Kuandyk Dussenbaev), grand gaillard lunaire qui la suit comme son ombre, de leur campagne (enchantée) jusqu’à la ville (viciée) où sa famille veut la marier. Si ce scénario proverbial prend une allure inédite, c’est d’abord parce qu’il prend place dans une région exotique, à la frontière entre Russie et Suède, où les gens ont un physique eurasien, parlent russe et se saluent d’un « salam aleykoum ». Mais aussi parce que son auteur, Adilkhan Yerzhanov, possède un style effrontément postmoderne et cosmopolite. La référence avouée, c’est Kitano, cité d’emblée dans une réplique de l’image-clé de Jugatsu puis un peu partout, d’une scène de slapstick au ralenti à ces plans composés comme des tableaux de maître zen (et même ces plans de tableaux, façon Hana-Bi). S’invitent aussi au programme, dans le désordre, Camus (le titre), Van Gogh (Les moissonneurs remplacés par flics endormis) et même notre Bebel national… Ce syncrétisme pourrait être éreintant, mais ne cesse de fasciner, revitalisant les genres qu’il touche – mélo, comédie, conte – avec un sens aigu du non-dit et une mélancolie persistante. Impossible de rester indifférent à ce film d’un autre monde. La tendresse l’emporte.
Michaël Patin

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

QUIEN TE CANTARA ★★★☆☆
De Carlos Vermut

Voilà quatre ans, le captivant Nina de la fuego autour d’un père tentant de réaliser l’ultime rêve de sa petite fille atteint de leucémie avait révélé la maîtrise de l’espagnol Carlos Vermut dans l’art du thriller. Et il règne dans Quien te cantara cette même atmosphère troublante, mêlant ambiance hitchcockienne et effluves almodovariennes. On y voit la fan numéro 1 d’une star de la chanson espagnole des années 90, Lila Cassen, embarquée dans une drôle d’aventure. Mère célibataire vivant dans un rapport très conflictuel avec sa fille, elle puise ses seuls moments de bonheur dans ces soirées où elle prend le micro dans le karaoké où elle travaille et se met à imiter son idole. Et voilà qu’un jour, on lui propose non seulement de rencontrer seule à seule Lila Cassen mais de lui réapprendre à devenir la chanteuse qu’elle est, alors qu’un accident l’a privée de sa mémoire.  La première partie de Quien te cantara confirme le talent intact de Vermut à créer une ambiance aussi trouble que troublante. Mais cette fois-ci, contrairement à La nina de la fuego, son récit peine à tenir sur la longueur. La faute à une succession de rebondissements menés avec moins de fluidité, à ce pénible rapport mère-fille sacrifiant trop à la facilité de l’hystérie et par ricochet à une manière de nous tenir éloignés de ses personnages sur lesquels il porte un regard trop dénué d’empathie pour nous faire partager leurs tristesses, leurs rages et leurs douleurs. Sa virtuosité atteint ici ses limites.
Thierry Chèze

CHAIR DE POULE  : LES FANTOMES D'HALLOWEEN 

D'Ari Sandel

Il y a trois ans, le premier Chair de poule séduisait par son propos rigolo, gentiment méta : les monstres des bouquins de R.L. Stine surgissent de la fiction pour foutre le bordel dans une petite ville américaine. Une bonne surprise, surtout que Jack Black incarnait Stine et donnait au film une solide base comique. La suite, Les Fantômes d'Halloween, ne fait guère d'efforts pour renouveler la sauce malgré son script co-signé Rob Lieber (auteur du magnifiquement délirant Pierre Lapin). C'est un peu trop lent et pas assez fou pour se relever la nuit, mais ceci dit, le film plaira certainement à un jeune public qui aime jouer à se faire peur.
Sylvestre Picard

BAMSE AU PAYS DES VOLEURS 
★★☆☆☆
De Christian Ryltenius

Bamse, l’ours qui a bercé l’enfance de plusieurs générations de jeunes Suédois, débarque en France pour de nouvelles aventures. Bamse est l’ours le plus fort du monde grâce au "miel du tonnerre" que lui prépare sa grand-mère. Sa gentillesse rayonne sur tout le village et ses habitants. Tous, sauf un. Jaloux du petit ours, Renard kidnappe la grand-mère pour lui soutirer la recette du miel magique et sème la panique dans la ville. Accompagné de Saut-de-puce le lapin et de Carapace la tortue, Bamse est prêt à tout pour sauver grand-mère, quitte à braver l’effrayante forêt des trolls. Fable morale sur la famille, l’amitié et la gentillesse, Bamse au pays des voleurs devrait séduire les tout-petits. Leurs accompagnateurs plus âgés devront en revanche prendre leur mal en patience.
Maxime Grandgeorge

DAKINI 
★★☆☆☆
De Dechen Roder

Kinley, détective bhoutanais, enquête sur la disparition d’une nonne bouddhiste dans la montagne. Il tombe sous le charme de Choden, sa seule suspecte, considérée par les villageois comme une sorcière, et part dans la forêt à ses côtés. Saura-t-il résister à cette femme fatale apparemment inoffensive et passer outre les superstitions villageoises pour faire toute la lumière sur cette affaire ? Dechen Roder, l’une des rares femmes cinéastes du Bhoutan, signe un premier long-métrage énigmatique et plutôt convaincant. On se laisse séduire par l’ambiance mystérieuse, la beauté des paysages et le charme de l’actrice Sonam Tashi Choden. Ce qui n’empêche pas le film de s’essouffler après un premier tiers intriguant.
Maxime Grandgeorge

 

Et aussi
L’envers d’une histoire de Mila Turajlić
Le rouge et le gris, Ernst Jünger dans la grande guerre de François Lagarde
People that are not me de Hadas Ben Aroya
Place de la République, Printemps 2016 de Leïla Ben Aribi
Les âmes mortes de Wang Bing

 

Reprises
Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau
Halloween, la nuit des masques de John Carpenter
Rétrospective Ingmar Bergman
Les valeurs de la famille Addams de Barry Sonnenfeld
Mon Oncle d’Amérique d’Alain Resnais