L’univers poéticofantastique de Malzieu apparaît comme contraint et empêché par les codes de la prise de vues réelles.
Sur scène avec Dionysos, par ses romans ou en animation avec Jack et la mécanique du coeur, Mathias Malzieu a su faire vivre tous azimuts un univers poético-fantastique où chaque discipline artistique vient compléter l’autre. Il aime y parler d’amour en imaginant des situations et des personnages qui, bien qu’en marge de la réalité, l’embrassent pour la sublimer. Une sirène à Paris s’inscrit pleinement dans cet univers. Malzieu y raconte l’histoire de Gaspard, un crooner solitaire dont le chemin croise celui de Lula, une sirène déposée sur les berges de la Seine par une crue exceptionnelle. Avec son coeur brisé par une histoire d’amour, Gaspard se révèle être le seul capable de résister aux chants de Lula qui font s’emballer celui des autres humains jusqu’à l’explosion... On se régalait d’avance de cette love story impossible entre un homme qui a souffert d’avoir trop aimé et une créature qui n’a jamais connu l’amour. Mais très vite, la mécanique se grippe. L’ambiance cabinet de curiosités qui fonctionnait à plein en animation paraît bien étriquée en prise de vues réelles. Comme si cet univers empêchait ses envolées poétiques et le ramenait à des choses trop terre à terre, obligeant ses protagonistes à commenter l’action au lieu de la vivre. On rêve de plus de fantasque pour renforcer une émotion indéniablement présente. Mais sans doute due à un manque de moyens, l’absence de ces moments conduit Malzieu à tuer à petit feu un élément primordial des histoires qu’il imagine : la part énorme laissée au lecteur ou au spectateur pour les compléter et mieux se les approprier.
Une sirène à Paris, en salles le 11 mars 2020.
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