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Josh, avant de donner la réplique à Benicio Del Toro dans Paradise Lost, tu avais joué sous sa direction dans un segment du film collectif 7 jours à la Havane. Quelle différence y a-t-il entre le Benicio réalisateur et le Benicio acteur ?C’est le jour et la nuit. Sur le plateau de 7 jours à la Havane, il était déchaîné, il se marrait tout le temps, buvait des coups, nous encourageait à improviser. Il y avait une atmosphère de liberté totale. Mais sur Paradise Lost, j’ai découvert un autre Benicio. Intense, extrêmement concentré. Entre chaque prise, il partait s’isoler, fumait une cigarette à l’écart du reste de l’équipe. Ce n’était plus du tout la même énergie. En tant qu’acteur, il est obsédé à l’idée de trouver la vérité de chaque scène. Il la cherche en lui-même autant que dans les yeux de ses partenaires. C’est super impressionnant.Et instructif, j’imagine, pour un jeune acteur comme toi…Bien sûr. Lui a appris la comédie auprès de Stella Adler (prof de theatre de Brando et de Niro, entre autres), alors, forcément, on progresse chaque jour à son contact…Tu es né en 1992, soit à peu près au moment où il commençait à exploser en tant qu’acteur. Quel est le premier film avec lui que tu as vu où tu t’es dit : « Wow ! C’est qui ce type ?! »Las Vegas Parano. Il est tellement dingue et sauvage là-dedans. Etre aussi libre, amener autant de vie à l’écran, c’est fou.Et le rôle qu’il a interprété qui te rend vraiment jaloux ? Celui qui te fait te dire : « si seulement on m’offrait des rôles comme ça… »Bah, Las Vegas Parano, justement. Même si c’est impossible d’imaginer quelqu’un d’autre que lui dans le rôle.Bon, je voulais te demander quel est ton film préféré avec Benicio mais je crois que j’ai ma réponse…Ah, ah ! J’adore 21 Grammes aussi, pour info.Est-ce que ça te fait souffrir d’être acteur à une époque où le cinéma que tu aimes, les films à la Las Vegas Parano, a de plus en plus de difficultés à exister ?Un peu, forcément. C’est un fait, Hollywood est aux mains des grands groupes. Tous les films sont franchisés et s’adressent à des spectateurs déjà captifs. C’est le règne de Transfomers et Hunger Games. Et pendant ce temps, le cinéma indépendant meurt à petit feu. Mais en se battant très dur, on peut encore y arriver. C’est pour ça que Tarantino est mon héros. C’est l’un des derniers à camper sur ses positions et à proposer des choses extrêmes et inédites.Tu dis : "C’est le règne de Hunger Games", alors que tu es toi-même l’une des stars de ces films. C’est amusant et… un peu schizo, non ?Hunger Games, en fait, c’est presque un contre-exemple. Oui, c’est une franchise, mais les livres sont bons, les scripts aussi, c’est bien produit, on ne se moque pas du tout du spectateur. C’est pas juste une enfilade d’explosions dans le but de remplir le tiroir-caisse. C’est même tout le contraire. Je crois que personne n’a le sentiment d’avoir été arnaqué en sortant de la salle.Tu ambitionnes toujours de réaliser un film ?Oui, j’écris des scripts mais j’ai encore beaucoup à apprendre. Je suis une éponge sur les tournages. Et j’ai des grosses lacunes en histoire du cinéma. L’autre jour, à Rome, Benicio était estomaqué d’apprendre que je n’avais jamais vu La Dolce Vita. La vérité, c’est que je n’ai jamais vu un Fellini de ma vie ! J’ai du pain sur la planche, comme tu vois.Tu es en pleine promo de Paradise Lost, tu vas enchaîner avec celle du nouveau Hunger GamesOui, j’ai seulement quatre jours off entre les deux…Quelle est la question que tu redoutes le plus ? Celle que tu aimerais qu’on te ne pose plus jamais ?"Quel objet emporterais-tu avec toi si tu devais aller te battre dans l’Arène pour de vrai ?" A force, ça rend dingue. Et j’ai comme l’impression qu’encore une fois, je ne vais pas y couper…Interview Frédéric FoubertParadise Lost d'Andrea Di Stefano avec Benicio Del Toro, Josh Hutcherson et Claudia Traisac sort aujourd'hui dans les salles Lire aussiNotre entretien avec Benicio Del ToroLooking for Pablo : sur le tournage de Paradise LostPourquoi Benicio Del Toro est né par incarner Escobar15 ans de traque d'Escobar à l'écran