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Après le succès de The Artist l’année dernière et le formidable parcours de De Rouille et d’os cette année, on pensait le cinéma français… intouchable. Mais les nominations aux Oscars 2013 ont douché les espoirs cocardiers et maintenant c’est le palmarès des Golden Globes qui oublie les Français. Est-ce vraiment une surprise ?  L’annonce des nominations aux prochains Oscars a pu étonner tant Intouchables et De rouille et d’os semblaient bien partis pour être en compétition… Après des mois à passer les étapes de présélection, la comédie d’Eric Tolédano et Olivier Nakache rate la catégorie du Meilleur film en langue étrangère et Marion Cotillard n’apparait pas parmi les meilleures actrices.   Aux Golden Globes, on attendait donc les prix de consolation. La cérémonie, d’habitude présentée comme la répétition des Oscars, devait être l’occasion de laver l’honneur tricolore et les deux longs-métrages étaient (bien) nommés parmi les meilleurs films en langue étrangère. De son côté, Marion Cotillard faisait face à (rien de moins que) Rachel Weisz, Naomi Watts, Helen Mirren et Jessica Chastain pour le titre de la Meilleure actrice dans un drame. Résultat des courses ? Les deux films n’apparaissent nulle part. La comédienne a été battue par Chastain et le buddy movie de Toledano Nakache par Amour.   Pouvait-on réellement s'attendre à mieux ?  Pas vraiment en fait. Intouchables ne faisait clairement pas le poids dans la catégorie Meilleur film en langue étrangère. Face au film de Michael Haneke, le seul challenger sérieux était Royal Affair. Et les spécialistes hollywoodiens annonçaient le triomphe d’Amour depuis des semaines. Au mieux, la comédie du duo Toledano Nakache faisait office d’outsider : « Amour a carrément une chance d'être nommé à l'Oscar du meilleur film, expliquait récemment le journaliste de Canal + Didier Allouche au Hollywood Reporter. Peut-être qu'Intouchables fera du coup la différence en étant la seule comédie présentée à celui du Meilleur film en langue étrangère ? ». Peut-être. Mais non.  « Pas si surprenante que ça » nous confiait le scénariste Thomas Bidegain vendredi quand on lui avait demandé de réagir à l’absence de De Rouille et d’os aux nominations des Oscars. Pas si surprenante que ça non plus l’absence du film d’Audiard au palmarès des Golden Globes. Sans remettre en question la performance (exceptionnelle) de Marion Cotillard dans le drame de Jacques Audiard, celle de Jessica Chastain est acclamée depuis des mois à Hollywood et la jeune femme a déjà reçu plusieurs prix qui semblaient annoncer sa consécration : aux National Board of Reviews et Washington DF Area Film Critics Association Awards, notamment.   Triomphe de l’Amour  Et puis Amour avait des atouts autrement plus forts. D’abord sa palme d’or qui écrase tout sur son passage. Ensuite le pedigree d’Haneke, cinéaste reconnu à Hollywood (plus que Audiard) où il a signé un remake de son propre film Funny Games. Et puis, couronner Amour c’est, pour l’industrie et la presse, sacrer une certaine cinéphilie européenne. Un cinéma d’auteur qui refuse tous les compromis et qui use (et abuse) des icônes de la nouvelle vague pour incarner un grand film morbide. Emmanuelle Riva c’est Resnais, Franju et Garrel d’un seul coup. Trintignant, c’est Lelouche. Face à ça, le cinéma d’Audiard, clinquant, moderne, qui prend sa source au grand mélo ricain (La Nuit du chasseur en tête) avait du coup moins de chance et paraissait moins… exotique.  Alors, la lose pour la France ? Outre sa célébration d’un certain cinéma français, Amour est aussi un film financé par des fonds tricolores. En pleine polémique sur le système de financement et face à la blague de Sacha Baron Cohen (sur Depardieu), tout est bon à prendre. Et puis on se réjouira du succès des Misérables. Même s’il doit se retourner dans sa tombe en entendant couiner Russel Crowe, Victor Hugo sauve un peu plus l’honneur de la France à Hollywood…