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Quelque part dans les Alpes, le jeune Jacky va hériter des pouvoirs de magnétisme de sa grand-mère qui s’apprête à partir pour l’au-delà. L’univers franchouillard (le côté « Jacky ») et chthonien (le côté « Caillou ») évoqué dans la première partie du film est très excitant. On part soigner en quad les bêtes malades des paysans voisins (excellente réplique : « J’ai une brebis qui déprime »). On nourrit ses pouvoirs de guérison magique par l’ingestion de foie cru. Et il flotte une atmosphère de fin des temps dans ces montagnes (« Le temps des abeilles est terminé », y entend- on ). La sincérité et l’authenticité, il y en a énormément dans Jacky Caillou, mais le film coince parfois en se laissant ligoter par une esthétique trop timide, en n’osant pas assez s’aventurer vers un monde magique et monstrueux (incarné par Lou Lampros, révélée cette année par Ma nuit, jouant avec superbe une jeune femme possédée par une tache répugnante qui contamine peu à peu son corps). Là où Petit paysan d’Huberr Charuel réussissait brillamment la vivisection du « film-Fémis » type (en gros : John Carpenter fusionne avec Robert Bresson), Jacky Caillou porte sans doute encore trop de stigmates scolaires, indéniablement extrêmement prometteur mais trop dépendant de ses modèles et de son moule. En fait, le twist du film est que Jacky ne s’appelle pas réellement Jacky, et ça abime aussi un peu de notre amour pour l’univers underground alpestre de Jacky Caillou : trop Fémis, donc, pas assez Caillou, pas assez Jacky.