Kizazi Moto
Disney+

Rencontre avec Peter Ramsey, producteur de la série d’animation Kizazi Moto : Génération Feu et co-réalisateur de Spider-Man : New Generation.

Co-réalisateur de Spider-Man : New Generation (Into the Spider-Verse), Peter Ramsey a décidé de tendre la main aux animateurs du continent africain en produisant la série Kizazi Moto : Génération Feu, disponible sur Disney+. Une anthologie très énergique et assez ébouriffante visuellement, composée de courts-métrage de science-fiction. Lors du Festival international du film d’animation d’Annecy, où les premiers épisodes ont été dévoilés, Ramsey nous racontait son implication dans le projet et comment le Spider-Verse a changé sa carrière.

Première : Comment avez-vous découvert l’animation africaine ?
Peter Ramsey : J’ai eu l’opportunité de me rendre au festival d’animation du Cap en 2019, l’année d’après Into The Spider-Verse. J’y ai rencontré les gens de Triggerfish, le studio en charge d’une partie des épisodes de Kizazi Moto, ainsi que plusieurs animateurs et réalisateurs qui ont fini par s’intégrer au projet. J’étais bluffé par l’enthousiasme de tous ces gens. J’avais l’impression que toute cette énergie artistique était prête à exploser et à déferler sur le monde. Ils avaient des choses à dire, et sans carriérisme aucun. Juste une véritable désir de raconter des histoires. Six mois plus tard, Triggerfish m’a recontacté pour me dire qu’ils avaient signé avec Disney+ pour une anthologie, et qu’ils avaient l’espoir de travailler main dans la main avec les personnes que j’avais pu raconter. Il fallait que j’en fasse partie !

Qu’est-ce que ça change de passer à la production quand on a eu les mains dans le cambouis en tant que réalisateur ? Quel type de superviseur êtes-vous ?
Je n’oserais pas parler de supervision ! J’ai juste essayé de partager avec eux certaines choses que j’ai pu apprendre dans ma carrière de réalisateur. Ils me questionnaient beaucoup sur ce que c’est de travailler avec un gros studio, sur les coulisses de l’industrie de l’animation à Hollywood. Et je leur disais : « Les gars, vous avez tout ce dont vous avez besoin. Vous avez les idées, le talent et la passion. » Mon rôle s’est en fait limité à leur dire qu’ils allaient y arriver, mais qu’ils devaient conserver leur vision. C’était du soutien. 


Tout le monde pensait qu’après l’Oscar d’Into The Spider-Verse, vous alliez vous lancer immédiatement dans un nouveau film d’animation. Et finalement, vous avez réalisé des épisodes des séries Star Wars The Mandalorian et Ahsoka. Pourquoi ?
J’étais storyboarder pour des films live bien avant de me lancer dans l’animation [il a notamment travaillé sur Men in Black, Independence Day, Dans la peau de John Malkovich, Fight Club, Minority Report…]. J’ai beaucoup appris de la part de grands réalisateurs. Et j’ai toujours voulu garder un pied dans les deux mondes. J’aime l’animation, j’aime la façon dont on la fabrique, et je n’ai aucune envie de totalement m’en éloigner. Mais le cinéma en live action a toujours été un de mes rêves. Quoi de mieux pour se lancer que de s’appuyer sur un Oscar ? La porte était ouverte, et je ne voulais pas attendre qu’elle se referme ! Un film d’animation m’aurait occupé pour quatre ou cinq ans, j’aurais été bloqué. J’avais envie d’explorer. Mais je reste connecté au Spider-Verse, en tant que producteur.

Ce n’était pas trop dur de laisser votre « bébé » dans d’autres mains pour Across The Spider-Verse ?
(Rires.) Non, pas vraiment. Ce sont des films incroyablement durs à faire. J’ai passé trois années très intenses sur le premier, et une partie de moi pensait : « Bonne chance pour la suite les gars, ça sera pas de la tarte ! » (Rires.) Mais je ne me suis pas senti coupé de cet univers, j’ai pu lire des versions du scénario et des montages du film. Je donnais mon avis sur quelques petites choses ici et là. Position assez confortable, je dois l’avouer ! La nouvelle équipe est fantastique, et puis Chris Miller et Phil Lord tiennent le fort. Ils avaient tout ce qu’il fallait pour réaliser un nouveau chef-d’oeuvre. 

L’impact visuel d’Into The Spider-Verse et Across The Spider-Verse se fait déjà sentir dans l’industrie. Selon vous, après quinze ans de domination de Pixar et Illumination, les grands studios hollywoodiens vont-ils bêtement copier la recette du Spider-Verse ou bien laisser les créatifs inventer de nouvelles esthétiques ?
J’espère vraiment qu’on n’aura pas droit à une succession de pâles imitations. Quand on a fait le premier film, il s’agissait d’essayer quelque chose de différent tout en collant à l’histoire qu’on voulait raconter. C’est ce que j’aimerais léguer : que les artistes parviennent à communiquer visuellement l’essence même de ce qu’ils veulent raconter. On a utilisé le langage des comics parce que ça avait du sens pour le film, mais ça ne peut pas s’adapter à tout ! Je commence à voir des évolutions, comme Nimona sur Netflix qui a un look bien distinct. Même Pixar tente des choses. J’espère aussi qu’au niveau de la tonalité des films, on verra une évolution dans l’animation américaine. Des choses toujours aussi fun, mais légèrement plus adultes. Que les artistes regardent l’animation avec un petit pas de côté et s’autorisent à raconter des histoires de façon un peu plus sophistiquée.

Kizazi Moto: Génération Feu, à voir sur Disney+.