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Il aura fallu attendre 1993 et La Liste de Schindler - certains l'appeleront le "film de la maturité" - pour que Steven Spielberg décroche enfin l'Oscar du meilleur réalisateur. Si depuis, il en a glané un autre pour Il faut sauver le soldat Ryan, c'est bien avec ce film si personnel sur l'Holocauste que le cinéaste américain - président du prochain Festival de Cannes - fut enfin reconnu par ses pairs.Si Liam Neeson, méconnu à l'époque, campait un inoubliable Oskar Schindler, industriel allemand qui allait sauver de la déportation des centaines de Juifs, Ben Kingsley un bouleversant Itzhak Stern, et Ralph Fiennes un terrible Amon Geoth, un autre personnage, furtif et muet, avait lui aussi attiré l'attention : la petite fille au manteau rouge, seule touche de couleur dans ce film tourné en noir et blanc par le brillant chef opérateur oscarisé Janusz Kaminski.Apparue une première fois en plein cœur du film, perdue au milieu des ruines et des corps du ghetto de Cracovie, la "petite fille au manteau rouge" allait faire une seconde apparition poignante au début du troisième acte, le corps sans vie mêlé à d'autres inertes sur une carriole, ce qui allait pousser Oskar Schindler à faire encore plus.Vingt ans après la sortie de ce film qui a remporté sept Oscars à Hollywood, celle qui incarnait ce personnage marquant a livré une interview au Times. Âgée de 3 ans à l'époque du tournage, Olivia Dabrowska, jeune femme de 23 ans devenue étudiante, revient dans les pages du journal britannique sur cette première expérience devant la caméra.Si Steven Spielberg, à l'époque du tournage, lui avait conseillé d'attendre ses 18 ans pour découvrir le film, elle confie que, poussée par la curiosité, elle n'a pas pu s'empêcher de le regarder à 11 ans, et la réaction fut immédiate : "J'étais horrifiée. J'ai vraiment regretté. Je me suis dis que je ne le reverrais plus jamais de ma vie."Une impression qui l'a poursuivie longtemps durant son adolescence, et ce, malgré l'enthousiasme de ses parents, fiers que leur fille - qui vit toujours et étudie à Cracovie - ait participé à ce chef-d'œuvre : "J'avais honte d'apparaître dans ce film et j'étais furieuse quand mon père et ma mère parlaient de mon rôle à leurs amis. (...) Tout ça m'énervait."Aujourd'hui, la honte a disparu et Olivia est enfin consciente du poids de cette expérience : "J'ai fait partie de quelque chose dont je peux être fière." Si elle avoue jouer encore un peu la comédie - "mais uniquement comme un hobby" -, Olivia souhaite faire carrière dans l'édition une fois qu'elle aura terminé ses études. Toujours est-il qu'en une apparition de quelques secondes, Olivia restera à jamais comme un personnage mémorable de l'histoire du cinéma.La bande-annonce de La Liste de Schindler, de Steven Spielberg, sorti en 1993 :