Ce qu’il faut voir en salles.
L’ÉVÉNEMENT
TOP GUN : MAVERICK ★★★☆☆
De Joseph Kosinski
L’essentiel
Trente- six ans après, une suite en forme de tour de manège euphorisant. Mais qui pointe aussi, à force de clins d’œil au passé, les limites de la mythologie Top Gun.
Tony Scott, réalisateur du premier Top Gun en 1986, résumait : « Les scènes entre les personnages ne sont que des pauses entre les scènes d’avions ». En gardant cette idée en tête, on ne peut pas trop en vouloir à Top Gun : Maverick d’être plus à l’aise dans les airs que sur le plancher des vaches. A terre, le film est en effet plombé par une espèce de nostalgie surjouée, mécanique. Cette révérence excessive envers le passé, en ne provoquant que très peu d’émotion, souligne l’étroitesse d’un univers quand même assez rudimentaire. Le film décolle en revanche totalement quand il se laisse aller aux joies de la vitesse, de l’euphorie cinétique, de la sensation pure. L’intrigue « militaire » est bien meilleure que celle du premier film, Tom Cruise et le fidèle Christopher McQuarrie (ici co-scénariste) s’amusant en cours de route à transformer ce Top Gun 2 en une sorte de Mission : Impossible 6 ½. Arrivé dans le film en vétéran fatigué, Tom Cruise en ressort régénéré, affirmant sa nature de super-VRP de « l’expérience cinéma ». La mythologie de Top Gun est peut-être limitée, mais celle de Tom Cruise, elle, semble inépuisable.
Frédéric Foubert
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A ADORE
FRERE ET SOEUR ★★★★☆
De Arnaud Desplechin
Desplechin renoue avec l’univers de ces chroniques familiales dont le déchirement constitue le cœur battant de tant de ses films. En l’occurrence donc, ici, un frère et une sœur, mus par une haine réciproque qui, après 20 ans sans se voir, vont être appelés à se croiser au chevet de leurs parents plongés dans le coma après un grave accident. Desplechin renoue ici avec le sens du romanesque qui faisait tant défaut à Tromperie. Dans Frère et sœur, on sourit pour cacher sa peine, on se tait puisqu’aucun mot ne peut traduire la violence de ce qu’on ressent. Et quand soudain, la parole reprend le dessus comme un volcan endormi se réveille, le moment vous scotche de brutalité. Et, pour transmettre tout cela, Desplechin montre une fois encore qu’il est l’un des plus passionnants d’acteurs en France. De Melvil Poupaud à Patrick Timsit, cherchez une fausse note et vous n’en trouverez aucune, dans les familles de cinéma qu’il réunit à l’écran. Quant à Marion Cotillard, elle livre l’une des plus belles partitions de sa carrière où la puissance de son explosivité est en permanence contenue et s’exprime plus dans des éclats de rires ou des regards éperdument perdus que dans des déflagrations impétueuses. Redécouvrir une actrice qu’on pensait connaître par cœur, c’est aussi cela la magie Desplechin.
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A AIME
LES CRIMES DU FUTUR ★★★☆☆
De David Cronenberg
Il avait annoncé arrêter le cinéma, et semblait absent de ses derniers films, mais Cronenberg est de retour. On suit ici, dans un futur proche dévasté par la crise climatique, les péripéties d’un couple. Saul Tenser (Viggo Mortensen) est un performeur qui met en scène la mutation de ses organes internes dans des spectacles d’avant-garde. Caprice (Léa Seydoux) est sa complice. Alors que leur numéro prend un tour plus sexuel, un fonctionnaire pose des questions, un flic entre dans la danse et un groupe d’activistes cherche à profiter de la notoriété de Saul. Les crimes du futur ressemble donc à un atlas de la psyché cronenbergienne, revenant inlassablement au corps, à la technologie, au sexe et à la maladie… Mais il possède une dimension plus personnelle que ses grands opus 80s et 90s. Comme si, en vieillissant, les fétiches du cinéaste devenaient étrangement plus intimes, dans un ensemble chargé d’une subtile dérision. La musique de Shore, le jeu halluciné de Stewart, ou les bavardages parfois absurdes installent une distance amusée. C’est cette distance qui rend cette fable SF étrange, ludique et hypnotique.
Gaël Golhen
Lire la critique en intégralitéDON JUAN ★★★☆☆
De Serge Bozon
Jamais Serge Bozon ne s’était employé à parler d’amour. Alors pour une première, il a choisi une histoire iconique, Don Juan, mais en s’en emparant à sa façon, singulière et décalée : en inversant les rôles. Le Don Juan de Bozon n’est plus l’homme qui séduit toutes les femmes, mais un homme obsédé par une seule femme : celle qui l’a abandonné et qu’il voit désormais dans toutes les autres. Ce parti pris va heureusement au- delà d’une scolaire variation sur la question du genre, surfant sur une vague post #Metoo. Car en faisant de ses personnages deux comédiens répétant la pièce de Molière, cette mise en abyme permet de parler avec profondeur du travail et de l’engagement des acteurs. Le tout en musique et en chansons, prolongement naturel des dialogues, des silences et des blessures des personnages. Le résultat pâtit parfois d’une cérébralité qui étouffe l’émotion mais peut compter sur ses deux interprètes pour apporter de la chair et des larmes à son propos : Tahar Rahim et Virginie Efira. Avec à leurs côtés, un Alain Chamfort bouleversant en père d’une fille au destin funeste, autrefois séduit par Don Juan. Son élégance et son exquise maladresse ne sont pas les moindres des atouts de ce Don Juan.
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéBIRDS OF AMERICA ★★★☆☆
De Jacques Loeuille
Le documentariste Jacques Lœuille remonte le Mississipi sur les traces de Jean-Jacques Audubon, peintre français du début du XIXème siècle qui parcourait la Louisiane pour peindre les oiseaux du Nouveau Continent. Birds of America est moins un portrait de l’artiste que l’évocation, à travers ses œuvres et son parcours, d’un pays disparu : ce paradis terrestre qu’était l’Amérique pré -industrielle. La plupart des espèces d’oiseaux que peignait Audubon étant aujourd’hui éteintes, rappeler leur existence permet de souligner à quel point l’idéal US initial, dont l’exaltation de la nature était une part essentielle, a été corrompu. Lœuille filme les usines, les cieux pollués, la destruction des écosystèmes, comme autant de preuves de l’échec de cette promesse originelle, dans un film-essai lyrique et politique. Une ode saisissante à une splendeur américaine évanouie.
Frédéric Foubert
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoPREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME
HOMMES AU BORD DE LA CRISE DE NERFS ★★☆☆☆
De Audrey Dana
Ca commence très fort avec un montage ultra dynamique d'hommes à la dérive : un conducteur de métro solitaire malgré lui et qui angoisse d'être sous terre ; un retraité qui passe ses journées sur son canapé et a arrêté de se laver depuis la mort de sa femme ; un père qui n'en peut plus de la vie de famille ; un homosexuel qui a grandi dans une famille très tradi et n'ose pas faire son coming out... Pour éviter de définitivement péter les plombs, tout ce petit monde va se retrouver dans une thérapie de groupe en pleine nature, dirigée par une femme aux méthodes étonnantes. Avec Hommes au bord de la crise de nerfs, Audrey Dana ambitionne d’ausculter le « mâle »-être contemporain à travers ces gaillards de 18 à 70 ans. Mais après une entame réjouissante, le récit devient trop programmatique et la réalisation moins inspirée. Mais difficile pour autant de résister totalement à la bonne humeur générale dégagée par ce feel-good movie, qui parvient à doser la dramaturgie pour éviter la carricature.
François Léger
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE N’A PAS AIME
CA TOURNE A SAINT- PIERRE ET MIQUELON ★☆☆☆☆
De Christian Monnier
Céline (Céline Mauge) est une actrice renommée mais gentiment paumée. Elle accepte d'aller tourner à Saint-Pierre et Miquelon sous la direction du célèbre réalisateur Milan Zodowski (Philippe Rebbot), adepte du cinéma vérité. Pour quel film ? Elle n'en sait rien, ou presque. Sur place, Céline déchante en découvrant que l'équipe n'est composée que d'un ingénieur du son et d'une régisseuse... Comédie dramatique pas très solide sur ses appuis, Ça tourne à Saint-Pierre et Miquelon - quel titre à la Max Pécas ! - passe son temps à chercher son identité. Le film évacue vite la piste du tournage rocambolesque pour basculer sur l'aventure intérieure de son héroïne : ça ne tient pas debout deux secondes, mais le récit s'obstine, étouffant savamment toute aspérité qui aurait fait sa singularité.
François Léger
Et aussi
L’Ombre des pères de Christine François
Reprises
Les Basilischi de Lina Wertmüller
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