Jack Reacher Never Go Back
Paramount

Entre screwball et thriller, le film d’Edward Zwick donne aussi plus d’épaisseur au héros incarné par Tom Cruise.

Mise à jour du 19 février 2021 : La suite de Jack Reacher, toujours avec Tom Cruise dans le rôle-titre, est désormais disponible sur Netflix et Amazon Prime Video. Voici ce qu'en disait Première lors de la sortie du film. 

Article du 18 octobre 2016 : Jack Reacher 2 commence sur une scène anthologique qu’on a pu entrevoir dans la bande-annonce. Assis dans un diner Tom/Jack, salement amoché, attend deux flics pour leur prédire le futur : des coups de lattes, une humiliation et la Justice Immanente comme conclusion. Une scène qui ressemble à la coda d’un film d’action efficace et bien balisé, mais qui n’est que le début d’une aventure qui ne suivra jamais les pistes lancées par le premier Jack Reacher.

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Souvenez-vous : le film de Christopher McQuarrie s’amusait à jouer avec le genre et jetait les bases d’une franchise « méta » avec un Tom Cruise plus mutique et violent que jamais. Grosse ambiance 70’s, beau tropisme flingue et vigilante… Edward Zwick n’en a visiblement rien à faire. En s’emparant du numéro 2, il remet les compteurs à zéro, inscrit son personnage dans l’époque (la nôtre) et vise à rendre Reacher un peu plus humain que la figure mystérieuse et proto-fasciste établie par le premier épisode. Jack Reacher façon McQuarrie était un Dirty Harry. Un ange exterminateur, mi Sherlock-mi Rambo qui flinguait de la racaille, en serrant les mâchoires et les abdos. Ici, il s’agit d’un homme en proie aux doutes, aux sentiments et embarqué dans une affaire qui le dépasse largement.

Thriller parano

Premier effet : le personnage n’a plus d’avance. Plongé dans une enquête complexe et aux ramifications profondes qui rappelle un peu les aventures de Bourne (avec officine secrète et compromissions militaires post 9/11 à tous les étages), Reacher doit dans Never Go Back affronter les dérives autoritaires de l’armée. Dès le début les questions pleuvent : pourquoi son seul contact au sein de l’US Army est-elle désormais accusée de meurtre alors qu’elle n’a visiblement rien fait ? A quoi riment les morts métronomiques qui pleuvent sur la base ? Et que vient faire cette étrange société militaire privée qui lui colle aux basques ? Thriller parano, Jack Reacher numéro 2 est sur le terrain de l’action aussi efficace que le premier et les bonnes séquences ne manquent pas. La course de Camaro a été remplacée par une traque à pied à La Nouvelle-Orléans et une scène de poursuite-fusillade nocturne démente répond au final dans le chantier du premier opus. On appréciera le moment où Jack/Tom inflige sur les toits de NOLA une leçon de krav-maga qui s’achève par un saut dans le vide impressionnant.  

 

Jack Reacher Never Go Back
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Entre Guerre des mondes et Night and Day

Mais il n’est pas seulement question de ça. Pour creuser le portrait de son héros fantomatique, et donner un peu plus de corps à Reacher, Zwick et les scénaristes le confrontent à son passé. Et au moment où Reacher casse des gueules dans les couloirs feutrés de Washington, surgit une gamine de 16 ans qui prétend être sa fille. Sauver le monde ? OK. Cimenter sa famille ? Plus compliqué et c’est l’enjeu de ce film. Zwick réussit à équilibrer actioner et comédie du remariage où Reacher doit gérer une (son ?) ado ainsi qu’une femme (Cobbie Smulder, impeccable) qu’il désire mais que sa mission ne lui permet pas d’emballer aussi vite que prévu. Embringuée dans un gymkhana transcontinental où, de Washington à la Nouvelle-Orléans, le mot d’ordre est de ne jamais accorder au spectateur plus de trente secondes de répit, la drôle de famille dysfonctionnelle doit trouver un mode de fonctionnement entre gunfights et courses poursuites haletantes. Le film (surtout dans sa deuxième partie) emprunte beaucoup à la screwball et passe du thriller burné à un registre plus léger avec beaucoup de souplesse, chaque personnage devant gérer des questions triviales dans des situations… hum originales. Comment gérer le désir qui vous tombe dessus alors qu’on doit résoudre une affaire mettant en péril l’US marine ? Comment négocier la permission de sortie du soir alors qu’on est poursuivi par un tueur surarmé ? Comment être un héros d’action quand on est dépassé par les événements et qu’une femme soldat vous met à l’amende sur tous les plans ? C’est évidemment là que le film devient passionnant : le vrai sujet de Jack Reacher (nouvel avatar de Tom Cruise, encore plus qu’Ethan Hunt) c’est évidemment Cruise lui-même. Son Ethan Hunt et son Maverick se bousculent dans le cuir cintré de Reacher, lui font traverser les pires embûches, mais derrière tout ça se profile aussi l’autre face plus amusante et friendly de l’acteur, celle de papa poule ou de lover niais mais pas trop qu’il a déjà incarné par le passé (Entre Guerre des mondes et Night and Day).

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On pourrait s’amuser à théoriser avec Zwick et l’acteur, mais le plus important est ailleurs : chaque scène – même prendre un café – est un morceau de bravoure ; chaque dialogue une punchline ; et chaque coup dans la gueule fait très mal. Parce que même quand il est en mode rom-com, il ne faut pas trop se frotter à Jack Reacher.

Bande-annonce de Jack Reacher Never Go Back :

 


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