Première
Si l’invention du cinéma coïncide avec la création de Dracula par Bram Stoker, l’histoire de l’un a rapidement croisé la route de l’autre, et ce sans relâche jusqu’à aujourd’hui. Cette année, entre Renfield et ce Dernier Voyage du Demeter, l’adaptation traditionnelle du roman semble avoir laissé la place à des focus précis et genrés. Dans ce dernier, le cadre se resserre sur le transport en bateau du comte Dracula de la Transylvanie à l’Angleterre, dans un registre se voulant horrifique. Le vampire est alors troqué pour une figure monstrueuse vidée de sa substance originelle, dans un design franchement hideux, tel Golum qui aurait servi de modèle à une gargouille.
À bord du Demeter, l’équipage mène tranquillement sa barque, jusqu’à ce que les nuits soient peu à peu ponctuées d’événements à gravité progressive : mort d’un animal, puis de personnages secondaires, jusqu’à l’affrontement direct avec Dracula. Proprement mécanique, ce Dernier Voyage souffre de la répétition de ses mêmes scènes et d’un scénario devenant prévisible à force de reproduire systématiquement le dispositif où le vampire sort la nuit pour s’abreuver de sang. Réduire l’histoire au seul décor du bateau en huis clos devient dès lors un piège dans lequel le film semble faire naufrage. Le cinéma est loin d’avoir épuisé ce mythe moderne, mais ici il semble seulement le mobiliser comme prétexte (argument commercial ?) pour en tirer un film d’horreur aussi peu inspiré dans sa mise en scène qu’incarné par son casting…
Nicolas Moreno