Première
par Christophe Narbonne
Dans un village belge des Ardennes, le printemps ne vient pas. Et la tension ambiante se transforme alors en petite apocalypse. Jessica Woodworth et Peter Brosens, couple américano-belge atypique, signent des films où le discours écologique le dispute au lyrisme, le sacré au profane, la violence à l’apaisement, l’esthétisme à la vulgarité. C’est un cinéma à la fois moderne et suranné au-dessus duquel planent l'ombre du peintre Jérôme Bosch ainsi que celles de Buñuel, Kubrick et Malick ; un cinéma biberonné au surréalisme qui, en quelques tableaux impressionnants de beauté et d’étrangeté, parvient à susciter malaise et fascination. Il ne faut pas chercher de linéarité ni d’explication évidente à ce film apocalyptique dans lequel les habitants d’un village paumé parlent aux poules, traînent alanguis et tristes près des cours d’eau ou disent des phrases rigolotes du genre : « Tu ne te prends pas pour la queue d’une poire, toi. » Brosens et Woodworth nous alertent sur la fin du monde rural sous l’angle de la révolte de mère Nature, dont nous serions les enfants indignes, voués au bûcher. Saisissant.