Première
par Nicolas Bellet
Champion du box-office français en 2017 avec Raid Dingue, Dany Boon va-t-il récidiver cette année ? On peut penser que oui tant La ch’tite famille suscite des attentes folles, notamment en raison du “ch’tite” dans le titre. Brisons le suspense d’entrée : ce n’est pas une suite, même lointaine, de Bienvenue chez les ch’tis et même si Kad Merad apparaît (dans son propre rôle) le temps d’un cameo. Non, il s’agit bien d’une comédie originale qui entretient néanmoins avec le plus gros succès du cinéma français des rapports étroits ne serait-ce que dans la thématique de la confrontation entre deux mondes opposés. Dans Bienvenue chez les ch’tis, le sud rencontrait le nord ; ici, la province rencontre la capitale. Dany Boon s’y filme en designer parisien mondain, Valentin D., qui a bâti sa légende sur le fait qu’il était orphelin. Jusqu’au jour où, sous un prétexte de vaudeville (le frère du héros a fait croire à sa mère que le fils prodigue les invitait à Paris pour les 80 ans de celle-ci), sa famille nordiste débarque à un vernissage de son travail au Palais de Tokyo ! S’ensuit une série de quiproquos dont nous vous laissons la primeur.
Une comédie bienveillante
Comme dans Bienvenue chez les ch’tis, Dany Boon s’attache à régler leur compte aux clichés. Les nordistes ne sont pas que de doux rêveurs chaleureux, ils ont aussi leurs travers (le personnage de la belle-sœur mesquine et cachotière ; celui du père macho et buté) ; les parisiens ne sont pas que des snobs sans cœur, ils sont aussi ouverts (l’évolution du couple bobo Boon-Arné vers plus de générosité). Efficace, à défaut de très original, ce thème constitue le fil rouge d’un film bienveillant, jamais méchant. C’est peut-être sa qualité à l’heure où la comédie française privilégie l’impolitiquement correct et le cynisme à tout crin. C’est aussi son défaut dans la mesure où les surprises sont rarement au rendez-vous. Tout le casting, de Line Renaud à Boon, en passant par Guy Lecluyse et Valérie Bonneton, est porteur de cette « positive attitude » qui irrigue l’intrigue. Jusqu’à la formidable Laurence Arné, parfaite en designeuse hautaine qui va se découvrir un cœur et une âme au contact de son compagnon victime d’un accident -qui l’a rendu partiellement amnésique et fait redevenir ‘ch’ti ; c’est la grosse idée, un peu rebattue, du film.
Pierre Richard, caution burlesque
Côté mise en scène, Dany Boon assume de plus en plus une filiation lointaine avec Jacques Tati. La scène dite de « la salle de bain », où le personnage se démène face à des robinets récalcitrants, a quelque chose de monsieur Hulot aux prises avec la modernité de la maison dans Mon Oncle. La présence au générique de Pierre Richard affirme de son côté un peu plus la dimension visuelle du cinéma de Boon qui offre au “Grand Blond” des séquences de pure pantomime qui sortent le film d’un certain train-train formel et narratif. Richard est aussi le protagoniste d’un hommage –involontaire, le film a été tourné avant sa mort- à Johnny Hallyday qui devrait faire parler, en bien évidemment. En l’état, La ch’tite famille est là où on l’espérait, c’est-à-dire un peu au-dessus du tout-venant de la comédie française mais pas si haut perchée que cela.