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Lara a 15 ans, de beaux cheveux blonds et des yeux bleus pénétrants. Elle aspire à devenir danseuse et se bat pour être à la hauteur et faire virevolter un corps dont on sent bien vite qu’il souffre. À partir d’un tel sujet, le film pourrait glisser tranquillement sur les rails d’un récit adolescent comme il en existe des kyrielles. Sauf que le corps même du film semble, lui aussi, résister. La caméra colle l’héroïne de près, accompagne ses gestes et forcément dévoile un détail qui n’en est pas un. Lara a le corps d’un garçon et elle entend bien corriger cela. Avant que les hormones n’agissent, il faut faire avec et mettre un sparadrap pour cacher ce sexe d’homme qui ne lui correspond pas. Mais Girl n’est pas non plus le récit d’une jeune fille différente bientôt brimée par la communauté. Au contraire, le monde qui entoure Lara (père, petit frère, copines de classe, médecins...) a non seulement accepté cette « différence » mais fait avec. Certains soutiennent, d’autres restent à distance. Ce qui importe au cinéaste flamand Lukas Dhont, dont c’est le premier long métrage à seulement 25 ans, ce n’est pas tant de savoir ce qu’en pensent les autres que la façon dont Lara vit sa lente métamorphose, sa réappropriation physique. Le spectateur regarde cette jeune femme courageuse qui intériorise tout jusqu’à perdre haleine. Girl est un film fort et puissant porté par un jeune acteur (Victor Polster) d’une force et d’une présence inouïes. Ce qu’on appelle un choc.