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Étant donné la nature du film (les personnages sont plus importants que l’intrigue, et non l’inverse), son principal ressort repose sur ses interprètes. Si Clooney est un peu sacrifié et réduit à quelques tics, Pitt assure en répétant un numéro d’abruti à mi-chemin entre Johnny Suede et True Romance. Tilda Swinton s’amuse à se rendre odieuse, tant en pédiatre qu’en épouse opportuniste. Frances McDormand emporte la palme : aux antipodes de l’enquêtrice futée qu’elle jouait dans Fargo, elle incarne ici, avec un certain courage, une quinqua tapée prête à tout pour financer une opération de chirurgie esthétique.
Mais, sitôt les rires éteints après la présentation des protagonistes, l’histoire s’essouffle un peu. Mieux vaut alors se concentrer sur les aspects techniques de l’exécution, d’un niveau excellent. Du directeur de la photo au compositeur de la musique, tous ont manifestement pris du plaisir et donné leur meilleur. Reste un léger sentiment d’inaccompli. Tant de talent pour célébrer une association de crétins, c’est un luxe que peu de cinéastes peuvent se permettre aujourd’hui.
Toutes les critiques de Burn After Reading
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Ellepar Helena Villovitch
Devant ce délice de non-sens, on connait certains grognons qui font la fine bouche, qui soupirent qu'après un chef d'oeuvre comme No country for old men, le génial tandem aurait pu s'abstenir de tourner une comédie de moindre envergure... N'empêche qu'on s'amusera toujours plus en regardant un film mineur des frères Coen qu'en lisant un ouvrage majeur des frères Bogdanov.
- Pariscopepar Virginie Gaucher
Personne ne sort indemne de cette comédie noire et loufoque, faux film d’espionnage : ni les services secrets (russes et américains) en flagrant délit de stupidité, ni les personnages, égoïstes, cupides ou aveugles. Après une drame éblouissant, No country for old men, retour à la comédie avec ce film moins léger qu’il y paraît. Des services secrets dépassés, des citoyens intoxiqués (qui voient des terroristes partout) et délateurs (« Je ne sais rien mais je dirai tout »), une paranoïa généralisée : des éléments qui peuvent se voir comme une projection de la société américaine façonnée par l’administration Bush. Le générique est éblouissant : Brad Pitt, à l’ahurissant brushing, est un crétin de première, Clooney un séduisant menteur, Tilda Swinton et Frances McDormand, deux belles garces.
- Paris Matchpar Christine Haas
Incohérent, mais brillamment dialogué, le scénario reste bloqué sur le mode "foutraque" de leurs meilleurs thrillers comiques.
- Fluctuat
Après le magistral No Country for Old Men, les frères Coen sont de retour dans le registre comique avec une parodie des films d'espionnage au casting de luxe. Belle compétition de losers à l'intrigue gentiment absurde, Burn After Reading reste pourtant mineur dans la filmo des talentueux frangins. Linda (Frances McDormand) et Chad (Brad Pitt), employés d'un centre de Fitness, tombent sur un CD contenant les notes destinées au livre d'Osborne Cox (John Malkovich), analyste de la CIA fraîchement démis de ses fonctions. Imaginant la valeur des informations secrètes contenues sur le disque, Linda décide de faire chanter l'analyste, poussée par son obsession de subir un relooking extrême fort coûteux. Pendant ce temps-là, la femme d'Osborne (Tilda Swinton) pense le quitter pour Harry (George Clooney), séducteur de pacotille accro aux rencontres en ligne. Avec son intrigue loufoque génératrice de quiproquo et un casting impressionnant, Burn Afer Reading promettait d'être le digne successeur de The Big Lebowski, géniale comédie noire des frères Coen sortie il y a dix ans. Pourtant, passée la mise en place des personnages sous forme d'une compétition de losers, le film tombe un peu à plat. Les situations ubuesques s'enchaînent et se superposent sans prendre d'ampleur et on garde le sentiment d'un potentiel sous-exploité, l'absurde n'étant pas poussé assez loin alors qu'il est le ciment de l'intrigue.Fidèles à un certain sadisme, les frères Coen continuent malgré tout d'exceller dans la transformation d'icônes glamour en freaks ou losers pathétiques, en opérant une dégradation physique et parfois mentale de leurs acteurs. George Clooney est déjà passé par là, dans O' Brother notamment où l'on réalisait l'importance d'une coupe de cheveux. S'il est franchement loin de son image de sex symbol dans le film, il est cependant relativement épargné par rapport à Brad Pitt, prof de fitness en lycra accro au sport et aux boissons énergisantes, dont la coupe en brosse souligne admirablement les courants d'air de son cerveau. Un genre de bizutage peut-être, l'acteur faisant ici son entrée dans l'univers des frères Coen. Frances McDormand, à l'opposé de son rôle de fin limier dans Fargo, excelle en quinqua obsédée de chirurgie esthétique et complètement larguée dans l'opération de chantage qu'elle a fomentée. Quant à John Malkovich, il est égal à lui-même, grandiose et théâtral - le rôle a été écrit pour lui. Mais tout ce talent d'acteurs et de mise en scène semble presque gâché par le manque d'ambition du film. La réalisation, évidemment soignée, reste étonnamment classique et peu inventive, à part quelques plans superbes, notamment dans les couloirs froids et déshumanisés des bureaux de la CIA. S'il reste au final une sympathique comédie, Burn After Reading est à classer parmi les films mineurs des frères Coen, dont le talent nous aura rendus exigeants. Burn After ReadingDes frères CoenAvec George Clooney, John Malkovich, Brad Pitt, Frances McDormand, Tilda SwintonSortie en salles le 10 décembre 2008 Illus. © StudioCanal - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils comédie, réalisateur, acteur, actrice sur le blog cinéma- Les frères Coen sur Flu : lire la critique de O' Brother (2000), Intolérable Cruauté (2003), LadyKillers (2004), No Country for Old Men (2008)