Woody Harrelson
Sony Pictures Releasing France

Fin 2019, Woody Harrelson nous accordait un entretien pour la sortie de Retour à Zombieland, suite barjo où il reprenait le rôle de Tallahassee, redneck au grand cœur confronté à l’apocalypse zombie. Le film est rediffusé ce soir sur Canal +.

Quand on m’a dit que vous étiez à Hawaï en ce moment, je vous imaginais en vacances. Mais en fait, vous vivez là-bas ?
Tout à fait. Ma fille est venue au monde à la fin de Cheers [série comique dans laquelle il a joué durant huit ans] en 1993. Et comme je ne voulais surtout pas qu’elle grandisse à Los Angeles, j’ai cherché des endroits où on pourrait vivre. On a passé quelques années au Costa Rica, et on s’est finalement posés ici, à Hawaï. De toute façon, je n’ai pas envie d’habiter à L.A.

C’est sûr que Hawaï colle plus avec l’image qu’on se fait de vous…
(Rires.) Los Angeles est une super ville à visiter et j’y ai plein d’amis, mais pour élever des mômes ? Les gens ont une attitude là-bas... Les discussions tournent toujours autour du succès : dans quoi as-tu joué dernièrement ? Est-ce que ça a bien marché ? Je ne veux pas que mes enfants adoptent cette mentalité. Tout ça m’intéresse peu. Je mesure la réussite au niveau de bonheur, pas à l’argent ou la célébrité.

Le réalisateur Ruben Fleischer dit justement que vous avez passé du bon temps sur le tournage du premier Zombieland. Est-ce que…
(Il nous coupe.) Une des meilleures expériences de ma vie ! Tout le monde s’entendait à merveille, un tournage idyllique. C’est aussi là que je suis devenu pote avec Jesse Eisenberg. On a gardé des liens très forts, on en est à quatre films ensemble ! Mais pour tout vous dire, ça m’a pris un paquet de temps avant de jeter un œil au scénario. Mon agent n’arrêtait pas de demander : « C’est bon ? Tu l’as lu ? » Le script était tout en bas d’une pile... Moi je me disais : « Des zombies ? Vraiment ? Je suis tombé si bas ? » (Rires.) Et quand je l’ai enfin lu, j’ai tout de suite senti qu’il y avait quelque chose. Mais c’était impossible de savoir à quel point le film serait bien reçu.

Aujourd'hui les zombies sont sur tous les écrans, jusqu'à l'overdose. Pas trop étrange de replonger dans cet univers dix ans après ?
Pas du tout, parce qu’on en joue beaucoup dans le film et que notre ton est assez différent. C’étaient de belles retrouvailles, sans pression. Dans ces cas-là, tu n’as pas vraiment l’impression de travailler.

Vous tournez énormément, à raison de trois ou quatre films par an. C’est un besoin ou vous tordez votre nature ?
Hum... Très bonne question. Pourquoi je m’inflige ça ? (Rires.) Ça va complètement à l’encontre de ma personnalité de bosser autant. Au fond, je suis un vrai fainéant. Cependant, plein de films me sont tombés dessus en quelques années et j’ai ressenti le besoin de les faire. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus scrupuleux quand je choisis un projet. En 2018 et 2019, j’étais en vacances tout l’été. C’était grandiose.

Mais qu’est-ce qui vous a empêché de refuser des films ?
Au début des années 2000, j’avais un mal fou à trouver du boulot. J’ai compensé plus tard en travaillant énormément. C’était une façon d’en arriver au point où je pourrais me permettre de simplement profiter de la vie.

Pourquoi vous proposait-on moins de rôles à l’époque ?
J’ai joué dans quatre ou cinq films de suite qui se sont plantés, en gros de Larry Flynt à En direct sur Ed TV. Hollywood arrête de t’embaucher si tes films ne marchent pas. (Rires.) Pas plus compliqué que ça. Bon, on pourrait se focaliser sur le négatif, mais je n’ai pas vraiment envie de parler de ça...


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Changeons de sujet alors : en 2017, vous vous êtes lancé dans la réalisation avec Lost in London. Une comédie barjo, tournée et diffusée en direct dans les salles. Drôle d’idée pour un premier film, non ?
C’était effectivement un projet dingue. (Rires.) L’histoire est basée sur un truc qui m’est vraiment arrivé. [En 2002, lors d’une nuit alcoolisée à Londres, il a tenté de fuir après avoir cassé un cendrier dans un taxi. S’est ensuivi une improbable course poursuite qui a fini par le mener à passer la nuit en prison.] J’en avais honte et pendant longtemps j’ai mis ça sous le tapis. Et puis j’ai commencé à me dire que c’était une bonne base de comédie... J’ai écrit le script en me demandant si je ne pourrais pas tourner ça en un unique plan-séquence, comme Victoria de Sebastian Schipper, qui m’avait épaté. Alors pourquoi ne pas le diffuser également en direct dans des cinémas ? On m’a dit oui, et c’était parti. Ça a demandé deux mois de répétitions non-stop et on a rencontré tous les problèmes techniques possibles. Le direct a même sauté deux fois la nuit juste avant le tournage... C’est incroyable que ça ait marché !

C’était une expérience arty ou un vrai film ?
Les deux, non ? Je suis très content du résultat et ça fonctionne bien quand tu le regardes avec des potes. Je l’ai vu avec un public et les gens se marraient beaucoup. Mais j’aurais dû le jouer légèrement différemment, le film repose beaucoup sur moi et j’ai toujours l’air un peu trop sérieux.

Justement, vous avez rarement été tête d’affiche au fil de votre carrière. C’est un choix délibéré parce que vous préférez les seconds rôles ?
Effectivement, j’adore ça. J’aime l’idée de faire partie d’un groupe d’acteurs, d’une troupe. Je n’ai pas besoin d’avoir le rôle principal, d’être le héros. Ça ne m’a jamais vraiment titillé. Je n’ai aucun désir de briller. Je veux juste un personnage intéressant à jouer et être l’un des rouages qui permettront de raconter une bonne histoire. Pas plus.

Mais ce métier vous procure toujours autant de plaisir ?
Oui, et je le prends très au sérieux. Bon, il y a des rôles pour lesquels j’aurais dû plus m’investir... Ne cherchez pas, je ne dirai pas lesquels. Mais l’autre jour, j’ai vu Once upon a time... in Hollywood et ça m’a scotché : j’ai réalisé à quel point Leonardo DiCaprio et Brad Pitt, avec la carrière qu’ils ont, continuent d’y croire, d’aimer ce métier et de délivrer de grandes performances. C’est admirable.

Le film vous a plu ?
J’ai trouvé ça phénoménal ! Le storytelling est incroyable. Ce à travers quoi passe le personnage de DiCaprio, l’angoisse de ne plus être au top... Ça me parle. J’ai été touché par la façon dont tout ça l’affecte psychologiquement, le fait qu’il s’en veuille personnellement... Et j’admire l’imagination de Tarantino. Il s’en fout de changer de narrateur à la moitié du film ou de modifier l’Histoire. Il a sa vision et il fonce. Je l’adore.

Et pourtant, même s’il a coécrit le scénario de Tueurs nés, vous n’avez jamais tourné avec lui. Ce qui me semble fou, car vous seriez un parfait personnage tarantinien.
J’adorerais travailler avec lui. La prochaine fois que vous lui parlez, faites-lui passer le message ! Quentin, je suis disponible ! (Rires .)

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