Le réalisateur et scénariste du nouveau film événement de Netflix analyse pour Première ce qui se cache derrière sa chronique familiale apocalyptique.
Après avoir subjugué le monde entier avec son Mr Robot, Sam Esmail revient aujourd'hui avec un film tout aussi fascinant. Le Monde après nous, qui sort ce vendredi sur Netflix, parle d'apocalypse comme rarement. Le réalisateur plonge sa caméra au cœur d'une maison où deux familles sont contraintes de cohabiter, tandis qu'un gigantesque blackout leur fait craindre le pire... Mais que faut-il comprendre derrière tout ça ?
Attention spoilers majeurs (à lire après avoir vu le film) !
De l’effondrement de la civilisation au piratage des technologies en passant par la manipulation des communications, on retrouve dans ce long métrage des thèmes qui recoupent ceux de Mr Robot. Autant d'obsessions assumées par Sam Esmail, qui explique à Première trouver surtout "intéressant d'explorer l'humanité en temps de crise."
Le scénariste et créateur voit dans la chute du monde un prisme parfait, qui "a tendance à amplifier les problèmes qu'on a les uns avec les autres. C'est très bien raconté dans ce livre de Rumaan Alam (sur lequel est basé le film). Il montre bien comment on perd facilement le fil de notre humanité la plus basique. J'ai lu ce roman durant la pandémie et évidemment, ça m'a beaucoup parlé... Dans le contexte de la période, cela prenait tout son sens. Mais c'est toujours très pertinent dans le monde actuel, où l'on est tout le temps si proche du chaos. Quand tout s'effondre autour de nous, alors qu'on devrait se serrer les coudes plus que jamais. Or, c'est là qu'on se divise et qu'on s'oppose les uns aux autres. Je trouve ça fascinant."
C'est effectivement l'affrontement silencieux du couple Julia Roberts et Ethan Hawke face à Mahershala Ali et sa fille (Myha'la Herrold), des non-dits pesants dans une situation de plus en plus angoissante, qui fait la force du Monde après nous. Il n'y a pas véritablement de méchant. De vilains caractérisés. Ce n'est pas une vision manichéenne de la fin du monde.
Et d'ailleurs, au terme du film, on ne sait pas vraiment qui attaque les Etats-Unis. Les pays arabes ? La Corée du Nord ? Sam Esmail ne le dit pas et il nous confie que ce n'est pas important :
"C'est une question qu'on m'a beaucoup posée... Mais elle n'a jamais semblé cruciale pour moi. Si je prends un pays au pif sur la carte, que je dis que c'est lui le méchant dans le film, qu'est-ce que ça va apporter ? Est-ce que ça fera une meilleure histoire ? Non, pour moi, le fait de ne pas savoir qui est derrière cette attaque est le truc vraiment monstrueux du film."
Oui, il y a bien une attaque dans Le Monde après nous. Mais le spectateur, comme les personnages d'Esmail, est gardée dans une forme d'ignorance : "Le monstre du film, c'est que vous avez besoin d'une réponse claire et nette et ça n'arrive pas et ça rend dingue. Ça rend les gens dingues. C'est ce qui rend toute la situation aussi tendue dans cette maison, entre ces deux familles. C'était plus intéressant comme ça. L'ambiguïté me paraît plus correspondre à la réalité. Parce que la vie est souvent confuse. On n'a presque jamais de réponses faciles qui viennent expliquer les crises qui jalonnent nos vies."
Alors que faut-il comprendre de la fin ?
Sam Esmail resté évasif. Il nous confirme que New York est bel et bien en train d'exploser. Ce n'est pas un rêve ou une métaphore, mais la chute de l'Amérique, "qui s'effondre sur elle-même. Ces bombes qui explosent à la fin dans New York, c'est une mise en image de la société qui s'effondre sur elle-même."
Le Monde après nous, de Sam Esmail, à voir sur Netflix depuis le 8 décembre 2023.
Commentaires