Ressortie d'Avatar
20th Century Studios

A l'occasion de la ressortie au cinéma d'Avatar (le 21 septembre), Première fouille dans ses archives.

A l'occasion de la ressortie en salles d'Avatar, en version remasterisée 4K, nous repartageons des articles sur le film de James Cameron, véritable coup de coeur de la rédaction fin 2009. Il avait d'ailleurs été deux fois en couverture de Première ! Comme ce mois-ci, où c'est sa suite, La Voie de l'eau, qui est à l'honneur de notre nouveau numéro.


Avatar est un bijou de cinéma [critique]

Révolution ? Avec Avatar, James Cameron joue avec les outils technologiques les plus dingues. Et notamment, la mo'cap. La mo'cap ? Décryptage de ce procédé qui, grâce à Cameron, pourrait changer la donne du cinéma.
Par Pierre Lunn

1/ La Motion Capture c'est quoi ?
C'est une technique vieille comme le monde (numérique) consistant à capter (et non pas à capturer, hein) les mouvements "d'un élément réel pour les renvoyer dans un environnement virtuel". Pour faire dans le concret, disons que le curseur de la souris qui se déplace sur l'écran de votre ordinateur à partir du mouvement de votre main, serait une première forme de motion capture (du réel, votre main, au virtuel, l'écran, par le biais d'un mouvement). Depuis la démocratisation des effets numériques au cinéma, la technique est abondamment utilisée pour recréer des personnages virtuels selon un procédé très simple : il suffit de poser des capteurs sur le corps d'un acteur, notamment au niveau de ses articulations, pour faire ressortir un squelette "virtuel" de l'acteur. Ne reste plus après qu'à l'intégrer dans un quelconque environnement virtuel et/ou réel.

2/ Et c'est quoi la différence avec la performance capture?
La performance capture est un dérivé technologique de la mo'cap où les capteurs ne servent plus uniquement à recréer un squelette virtuel en mouvement, mais à capter également les mouvements les plus infimes, et notamment ceux du visage. L'intérêt est évident : si la mo'cap reproduisait de manière fidèle les déplacements d'un corps dans l'espace, la performance capture ajoute à cela les mimiques de l'acteur. Du coup les expressions faciales n'ont plus besoin d'être recréées a posteriori par des animateurs.

3/ Et quel est l'intérêt pour un cinéaste?
Selon Jon Landau, producteur d'Avatar, la performance capture serait "la prothèse du 21eme siècle". Et là tout est dit, comme si on recouvrait l'acteur d'un voile en image de synthèse. Pour y voir plus clair, il suffit de repenser au prototype du genre, le personnage de Gollum dans la trilogie du Seigneur des Anneaux : un personnage numérique, parfaitement incrusté a un environnement live, et qui a pu bénéficier du jeu d'Andy Serkis pour sonner si juste (dans ses expressions, sa façon de bouger, son regard). Grossièrement on pourrait donc dire que la performance capture concrétise cette idée folle d'insuffler de la vie là ou il n'y en a pas. Pour les cinéastes hi-tech, une aubaine donc : leur créatures numériques n'auront jamais sonné aussi vraie.

L’évolution de la performance capture racontée par Andy Serkis

4/ Pourquoi Cameron a t-il adopté cette technique?
Si Cameron n'avait pas attendu l'invention de performance capture, ses Na'vis aurait ressemblé à des créatures de synthèse complètement déshumanisées, un peu à la Final Fantasy : le film, ou alors a des acteurs coincés dans des costumes bleues et égarés devant un fond vert. C'est pour ca que le tournage a été constamment repoussé depuis une quinzaine d'années. C'est pour ca aussi que vous croirez dur comme fer avoir vu des humanoïdes bleus de trois mètres de haut en sortant de la salle.

5/ Si la Performance Capture est utilisée de puis des années, pourquoi nous vend-on ce film là comme une révolution?
D'abord parce que Cameron a nettement amélioré le système de la performance capture, notamment en plaçant une mini caméra vidéo devant le visage de ses acteurs, histoire d'être encore plus fidèle à la captation des expressions et des regards. Ensuite parce que jusque-là les films en performance capture (soit Le Pole Express, Monster House, Beowulf et Le Drôle De Noel Scrooge, tous produits ou réalisé par le défricheur Bob Zemeckis) ne visaient pas un rendu photo-réaliste à l'instar d'Avatar (qui devrait donc faire décrocher la mâchoire de pas mal de spectateurs, dans un choc similaire à celui de la découverte des dinosaures de Jurassic Park, 16 ans avant lui). Enfin parce que c'est un film de James Cameron (sans exagérer l'un des deux, trois plus grand cinéaste en activité) et qu'il devrait mettre le feu aux poudres, notamment via son succès, qu'on annonce colossal, et permettre à la fois à la performance capture et à la 3D de se démocratiser beaucoup plus rapidement.

Avatar raconté par James Cameron dans Première [partie 1]

6/ Et au fait, c'est quoi ce fameux simulcam ?
C'est à peu près le contraire de la méthodologie utilisée par Zemeckis sur ses films en performance capture. Là ou le réal de Retour Vers le Futur enregistrait la performance de ses comédiens sur le plateau, puis recréait le découpage de son film (mouvements de caméras, alternance des échelles de plans) au moment de la post prod, Cameron a choisi lui avec le simulcam, de tourner Avatar, comme un véritable film à l'ancienne, pour y insuffler une plus grande nervosité. La méthodologie est la suivante, un cadreur, caméra à l'épaule, shoote un acteur, engoncé dans sa combinaison pleines de capteurs sur fond vert. Les images sont transmises à un micro ordinateur qui se charge, immédiatement et simultanément, de transformer le fond en vert en décor (ici, la planète Pandora) et l'acteur en créature numérique (ici, un Na'vi), le tout est transmis sur un moniteur de contrôle pour permettre au réalisateur d'avoir, tout de suite, une idée du rendu final de sa séquence, et de pouvoir du coup donner illico des consignes plus précises aux acteurs comme aux cadreurs. Tous les avantages de la technologie donc, au service d'une plus grande dynamique et de d'une sensation unique de "pris sur le vif" .

Avatar raconté par James Cameron dans Première [partie 2]

En bonus : Durant les 12 ans qui ont finalement séparé Avatar et sa suite, La Voie de l'eau, James Cameron a eu le temps, avec ses équipes chargées des VFX, de peaufiner les techniques de mo'cap afin de pouvoir filmer une grande partie des scènes de cette suite sous l'eau. Comment cette prouesse a-t-elle été rendue possible ? Tous les détails sont à lire ci-dessous.

Au cours d'une conférence de presse organisée dans le cadre de la ressortie d'Avatar, il a aussi expliqué à quel point il était heureux qu'un nouveau public puisse découvrir son film au cinéma, dans une version encore plus belle qu'en 2009 : l'image a été restaurée en 4K et HDR, avec aussi quelques scènes en 48fps. Interrogée sur son meilleur souvenir de tournage, Sigourney Weaver a justement raconté son premier jour au sein du "volume", la pièce remplie de lumières et de caméras permettant d'enregistrer ses mouvements. Vêtue d'une combinaison pleine de capteurs, elle pouvait voir en direct son personnage de Grace en Na'Vi sur un moniteur retransmettant un premier rendu en direct. Une version non définitive, mais qui lui a permis de prendre conscience immédiatement de sa future apparence. "J'ai ressenti instantanément un immense soulagement, explique la comédienne. J'ai compris que grâce à cette technologie, on serait capables de créer cet univers."

Cameron est enfin revenu sur la mode de la 3D qui a suivi la sortie d'Avatar, et qui s'est un peu estompée depuis, mais sans disparaître complètement. Pour lui, l'influence majeure de son film sur les blockbusters modernes est avant tout technologique : "Je dirais tout d'abord que la 3D a été à la mode de façon globale durant un temps après ça. Avatar a gagné l'Oscar de la meilleure photographie avec une caméra digitale 3D. Ca n'avait jamais été le cas avant, et durant les deux ou trois ans qui ont suivi, les mêmes caméras qui avaient été utilisées par les chefs-opérateurs leur ont permis de gagner à leur tour un Oscar. Donc durant ces 3 ou 4 ans, l'Académie a vraiment reconnu cette nouvelle photo en numérique. Et tous ces films étaient en 3D."

Avatar 2 : Comment on tourne sous l’eau en performance capture ?