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Sur un sujet plus que délicat, Haim Tabakman signe un premier film sensible et juste. Malgré un morceau d’opéra envahissant et par trop signifiant (le Duo des fleurs du Lakmé de Léo Delibes), la mise en scène, au plus près des
personnages, parvient à les ancrer dans un quotidien saisissant. De contraignante et collégiale (les repas, la prière), la vie devient plus légère et intime (dans la boutique, à la mer) avant d’être à nouveau plombée par la pression extérieure. Des tracts dénonciateurs envahissent les murs, le cadre se resserre tandis que s’abat le spectre de la loi (des hommes et de Dieu). La liberté dérange. L’amour aussi.
Toutes les critiques de Tu n'aimeras point (Eyes wide open)
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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(...) découvert dans la sélection Un certain regard, à Cannes, ce premier film israélien touche et déroute.
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Avec une rigueur dans sa mise en scène qui l’éloigne de tout misérabilisme, il décrit avec une précision étouffante la pression collective dont Aaron est la cible au nom de cette homosexualité qu’on ne nomme jamais puisque ce mot n’existe pas aux yeux de ces ultra-religieux. Un véritable chemin de croix qui conduit Aaron dans une logique aussi implacable qu’absurde au sacrifice de son honneur, de son intégrité physique voire de sa vie au nom de sa passion. Un vibrant plaidoyer pour le respect d’autrui.
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Un thème poignant, servi par un scénario évitant tout psychologisme, et magnifié par une mise en scène envoûtante comme un rituel religieux et sensuelle comme un acte d`amour, où l`accomplissement de ce désir interdit est filmé à la fois comme une détresse douloureuse et un acte libératoire.
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Le soin apporté à la description des rites quotidiens, la rigueur de la mise en scène évitent tout sentimentalisme. (...) L'étouffement ressenti par les personnages est si bien rendu que le spectateur finit par l'éprouver à son tour. Cela n'empêche pas une émotion croissante. Le mérite en revient pour une large part aux comédiens. (...) Tu n'aimeras point ne se laisse pas facilement aimer, mais sa beauté s'impose.
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Décidément, Israël est un drôle de pays et il se passe de drôles de choses dans son cinéma. Tu n’aimeras point est le premier film de Haim Tabakman et l’on n’imagine a priori pas ce trentenaire, à la dégaine de surfeur ou d’étudiant arty en cinéma, s’illustrer dans une impossible histoire d’amour homosexuelle chez les haredim de Jérusalem. [...]En anglais et en hébreu, Tu n’aimeras point a pour titre Eyes Wide Open. Des yeux grands ouverts, mais sur quoi ? La vie des autres, qu’il faut surveiller, pour ne pas qu’ils sortent du droit chemin ? Ou alors l’hypocrisie foncière de toute communauté fondée sur la religion ?
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Plus proche d'Ethan Fox que de Gérard Pury, il aborde ce problème avec un tact infini, du respect et une tendresse empreinte de tristesse pour ses deux personnages principaux.
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Si Haim Tabakman parvient par moments à très bien filmer le désir, comme lors d'une jolie scène de baignade, il a plus de mal avec la chair en elle-même, un peu à l'image du personnage d'Aaron. Naissance du désir au milieu des chairs mortes de la boucherie, qui devient leur petit nid d'amour, il faut dire que l'imagerie déployée ici n'est pas légère. Et provoque parfois un léger malaise, au détour de scènes du type « allons donc découper le jambonneau ensemble... ». Pas très fin non plus sur la psychologie de ses personnages, le film enfonce souvent le clou là où cela ne sert à rien : Ezri est ainsi un artiste, puisqu'il est homosexuel. Et les tenants de la religion la plus dure sont tous très laids et hystériques.
On ne peut s'empêcher de regretter un scénario cousu de fil blanc, qui rend cette passion « hors la loi » un peu trop stéréotypée pour être réellement émouvante. -
Un boucher ultraorthodoxe de Jérusalem, marié et père de famille, s'éprend avec une passion irrépressible d'un jeune étudiant d'une école talmudique.
Familier des grincements politiques et des couples improbables (militaires homosexuels, idylle israélo-palestinienne...), jamais le cinéma israélien n'était allé aussi loin dans ce que l'on pourrait tenir pour une scabreuse provocation. Voici en tout cas un film qui, après Kadosh (1999), d'Amos Gitaï, Avanim (2004), de Raphaël Nadjari, et My Father, My Lord, de David Volach, témoigne avec acuité de l'épineux problème des rapports entre laïcité et religion en Israël, enjeu dont la résurgence frappe aujourd'hui à toutes les portes.
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S'il agace parfois à retenir l'histoire pour forcer l'empathie et créer un suspense factice, Haïm Tabakman tire son épingle du jeu grâce à une mise en scène qui témoigne d'un talent à installer une ambiance oppressante, parfait reflet des regards inquisiteurs et réprobateurs qui visent les deux hommes. Une preuve que le cinéma peut encore mener des combats importants.
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Un premier film courageux qui aborde avec une rigueur parfois bressonniene, l’homosexualité dans un milieu ultra religieux, et qui très certainement provoquera de vives réactions.
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Tabakman, trop guidé par le spectateur laïc et militant qu’il suppose être celui de son film, découvre avec une ingénuité agaçante un sujet pourtant rebattu et s’en tient à des généralités inoffensives au lieu d’explorer les détails inattendus de cette situation et sa profondeur théologique.
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Tout l'enjeu du film réside donc dans le point de vue adopté. A ne pas vouloir choisir celui du couple (l'élan de la passion) ni celui de la communauté (le respect des règles), mais en cherchant à fusionner les deux, le film fait sien un point de vue intenable, aberrant.