Cillian Murphy : "Christopher Nolan ? Je lui fais une confiance absolue"
Warner Bros

Rencontre avec l'un des acteurs de Dunkerque, qui a depuis retrouvé le cinéaste pour Oppenheimer.

A 21h05, France 3 rediffusera Dunkerque. Rencontré en mars 2017, l'Irlandais au visage anguleux Cillian Murphy en connaît un rayon sur Christopher Nolan. Ce film de guerre représentait leur cinquième collaboration, et ils ont depuis renoué avec le succès grâce à Oppenheimer, dans lequel Cillian tenait pour la première fois chez lui le rôle principal.

Pour patienter jusqu'à ce soir, nous repartageons notre entretien avec Cillian, complété avec d'autres interviews de l'acteur et du réalisateur, recroisés depuis.

On ne vous voit même pas dans les cinq premières minutes du film. Qui interprétez-vous ?
Ça va être compliqué : je n'ai pas vu le prologue que l'on vous a montré, et je n’ai même pas vu la bande-annonce officielle. De toute façon, je n'ai pas trop envie de vous parler de mon rôle parce que avec Chris, on a cette sorte d'accord qui consiste à ne pas trop parler des films en amont. C'est toujours mieux de laisser le spectateur vivre l'expérience sans qu’il sache à quoi s’attendre. Ce n'est même pas une histoire de spoilers... Je crois savoir que la bande-annonce en montre déjà trop.

C'est un film choral, sans vraiment de héros principal, comment on fait pour exister à l'écran parmi cette galerie de personnages ?
J'ai juste essayé de jouer mon rôle, de faire le boulot. Avec Chris, on travaille ensemble depuis maintenant de nombreuses années. Je lui fais une confiance absolue. Sur Dunkerque, j'ai juste attendu son coup de fil et après on a discuté du rôle. Comme d’habitude…

Sauf que là, le film marque une rupture avec ses œuvres précédentes et précisément pour l’écriture des personnages dont le passé n’est jamais évoqué. Comment avez-vous réussi à lui donner vie ?
Le script est comme une carte.... Devant un film de Chris, les spectateurs voient absolument tout de ce qui vient du scénario : il n'y a pas de scènes coupées avec lui, pas de reshoot. Tout est tourné car il sait exactement ce qu'il veut, où il veut aller et ce qu'il veut montrer. Pour ce film, je me suis documenté, j'ai beaucoup lu sur l'Opération Dynamo pour connaître le contexte de ces événements. Je voulais comprendre les stades émotionnels et psychologiques par lesquels étaient passés les soldats. Pas les backstories, mais les émotions. Je ne crois pas tellement aux backstories. A l'écran vous voyez les personnages, celui-ci est un gamin, celui-là un soldat et l’autre un général... Pas besoin de savoir si machin est marié et a des enfants ou si machin est doué en maths ! Ce qui compte c’est d’être juste, d'être vrai quand on joue parce que c'est ce qui fait que les gens y croient.

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Il y a la trinité Mer-Terre-Ciel dans le film. Vous vous situez de quel côté ?
La mer, indubitablement. C’est marrant parce que dans ma famille, du côté de ma mère plus précisément, on travaillait dans la marine marchande donc j'aime bien me retrouver sur l'océan. J'ai d'ailleurs tourné dans le film sur Moby Dick de Ron Howard... Le seul souci évidemment, c'est le mauvais temps mais Chris adore ça - tourner quand il fait mauvais temps. Quand on tournait Inception, de terribles orages sont venus perturber le tournage et Chris n’avait jamais peur : il n'est pas effrayé. Même par les éléments (sourire).

Dans Peaky Blinders vous incarnez aussi un soldat. Est-ce que cette expérience vous a aidé pour la composition de votre personnage dans Dunkerque ?
J'ai joué quelques fois des soldats, oui. Tommy [Shelby, le personnage qu'il incarne dans la série, ndlr] est très affecté par la Première Guerre Mondiale. J'ai également incarné un soldat récemment dans Anthropoid, un film sur la Deuxième. Je crois que j'ai dû interpréter des rôles de soldats cinq fois jusqu'ici, mais à chaque fois le défi c'est de se mettre dans la peau du personnage et traverser ce qu'il a vécu. Puis essayer d'en comprendre les mécanismes et de le jouer le plus honnêtement possible. C'est important aussi de lire sur le choc post-traumatique ou l'obusite [un trouble psychique dont ont été atteints certains soldats dans les tranchées durant la Première Guerre Mondiale, ndlr] pour parfaire le personnage.

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En vous documentant sur l'Opération Dynamo, avez-vous essayé de vous raccrocher à un personnage réel ?
Pas vraiment non... Il n'y a pas vraiment de figure historique dans le film, juste des anonymes, des soldats ordinaires. J'ai lu des lettres et des journaux de bords pour m’imprégner, mais c'est tout.

Vous avez tourné dans les mêmes conditions, la même plage et à la même époque que ce conflit, qu'est-ce que cela vous a fait ressentir ?
En fait, ma partie est différente de celle des autres comédiens et a été tournée exclusivement en Hollande. Tout se passe sur un bateau, un Moonstone et les scènes n'ont pas été réalisées à Dunkerque. Ceci dit, j’y suis allé pour voir à quoi ça ressemblait. C’est étrange. La vie a repris ses droits : les gens se baladent avec leurs enfants ou leurs chiens... Il n'y a pas de pèlerinage ou de sanctuaire et pourtant, on peut quand même sentir ce qu’il s’est passé : le sang qui a coulé, les bombes qui zébraient le ciel… C’est un endroit un peu dingue.

Ça vous parle la Seconde Guerre Mondiale ?
Je ne suis pas un fanatique de l'Histoire mais les histoires m’intéressent. La Seconde Guerre Mondiale fut une guerre globale et toutes les nations furent impliquées. Il y avait le nazisme, Adolf Hitler et le fascisme... J’ai l’impression qu’on savait clairement qui étaient les méchants et qui étaient les gentils. Aujourd’hui c’est plus compliqué… On pilote de petits ordinateurs qui tuent des gens à distance... Tout est mécanisé. C’est sans doute le recul qui permet ça, mais la Seconde Guerre est beaucoup plus facile à décrire car on voit les enjeux moraux de manière beaucoup plus claire et nette.

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