Affiches Films à l'affiche semaine du 30 octobre 2024
Le Pacte/ UFO Distribution/ Warner

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
ANORA ★★★★☆

De Sean Baker

L’essentiel

Sean Baker continue de s’affirmer en peintre subtil des marginaux américains avec cette variation azimutée sur Pretty Woman, où le fils immature d’un oligarque russe a pris la place du prince charmant. Une odyssée burlesque, Palme d’or à Cannes.  

On peut facilement décrire la Palme d’or 2024 comme une variation moderne et malpolie sur Pretty Woman. Le film raconte en effet la rencontre, puis la romance compliquée entre Anora (Mikey Madison), strip-teaseuse et prostituée dans une boîte new-yorkaise et un jeune Russe en goguette qui s’entiche d’elle et l’invite dans son immense baraque de gosse de riche pour passer, moyennant 15 000 dollars, quelques jours en sa compagnie avant de décider de l’épouser. Moment de bascule du film car l’annonce du mariage ne tarde pas à parvenir aux oreilles de la famille du jeune homme, en Russie qui va débarquer sur place pour tout faire annuler. Anora vire alors à la comédie chaotique sous amphètes entre bagarres homériques, parenthèses hystériques et longue virée dans la nuit new-yorkaise. On pense souvent au Uncut Gems des frères Safdie, pour cet art de la digression. Le cinéma des années 70 n’est pas loin non plus, pour la manière dont la très belle photo du chef opérateur Drew Daniels capte la froideur de l’hiver. Car si Anora se présente comme une comédie, c’est la puissance émotionnelle de son dernier acte qui fait vraiment son prix.

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

FLOW, LE CHAT QUI N’AVAIT PAS PEUR DE L’EAU ★★★★☆

De Gints Zilbalodis

Ce film d’animation sans paroles met en scène un adorable matou se réveillant dans un monde où l’humanité semble s’être évaporée. On a à peine le temps de se questionner sur les raisons de cette disparition qu’un un raz-de-marée engloutit une bonne partie des terres. L’eau ne faisant que monter, le chat trouve alors refuge sur un bateau, seule chance de survie, avec un groupe d’animaux disparates. Des personnalités immédiatement incarnées par le réalisme sidérant des bruits et des mouvements des bestioles, avec une imagerie 3D minimaliste qui emprunte au jeu vidéo. Voilà qui suffirait à nourrir un conte façon Disney d’Europe du Nord, mais Zilbalodis impose un ton qui lui est propre, léger et grave à la fois, minimaliste et massif, sensoriel et onirique. Et signe fable, une grande, émouvante et sincère, sur le pouvoir du collectif mais aussi un peu sur l’inutilité de notre espèce, voire sa responsabilité dans l’effondrement du monde.

François Léger

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PREMIÈRE A AIME

JURE N°2 ★★★☆☆

De Clint Eastwood

Justin (Nicholas Hoult), jeune homme bien sous tout rapport, se retrouve juré dans une affaire de meurtre ultra-médiatisée. L'accusé, un homme violent, aurait tué Kendall, sa compagne, après une dispute dans un bar. Pour la procureure, c'est une affaire idéale. Le coupable est tout trouvé, et ce procès va pouvoir booster sa campagne électorale. Sauf que plus Justin écoute les témoignages, plus ça se complique : le soir du meurtre, il était dans le bar en question et en rentrant chez lui, il a percuté quelque chose qu'il a pris pour un cerf. Et si c'était Kendall ? Relecture ludique de 12 hommes en colère, Juré numéro 2 est un courtdroom drama qui cache un twist. Eastwood y reste fidèle à ses thèmes et à son style. Le dilemme de son personnage lui sert de boussole et il joue sur un registre très économe qui ravira ses fans. Juré n°2 sera t’il l’ultime Eastwood ? Il n'y a en tout cas rien de testamentaire dans ce film ludique et profond qui ausculte la justice en tant que système et qu’idéal moral.  

Pierre Lunn

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SUR UN FIL ★★★☆☆

De Reda Kateb

Depuis ses débuts voilà 15 ans dans Un prophète, Reda Kateb n’a eu de cesse comme acteur d’arpenter des univers où on ne l’attendait pas forcément. Et il en va de même pour son premier long métrage réalisateur où il plonge dans l’univers des clowns pour enfants malades par le prisme d’une jeune artiste de rue qui, après une grave blessure, va s’y reconstruire et trouver un sens à son existence. Kateb assume en effet à 100% le registre ultra- émotionnel dans lequel son récit évolue, sans chercher à le complexifier inutilement pour « faire auteur ». Il y a dans cette limpidité, dans cette foi en la noblesse d’un cinéma populaire qui parle au cœur un geste de fait audacieux à notre époque du cynisme roi. Et le choix de son casting sans tête d’affiche (dont Aloïse Sauvage, lumineuse dans son premier grand rôle) et la simplicité discrète d’une mise en scène au service de son propos témoignent d’une sensibilité qui évite toute sensiblerie. Un film à son image : riche et généreux.

Thierry Cheze

L’ART D’ÊTRE HEUREUX ★★★☆☆

De Stefan Liberski

Il a toujours rêvé d’être reconnu pour ses œuvres sans que jamais la gloire ne vienne frapper à sa porte. Alors Jean- Yves, le peintre, héros du nouveau Stefan Liberski (Bunker Paradise) a décidé de changer de vie et de s’installer dans une petite ville normande afin d’y trouver l’inspiration pour créer son chef d’œuvre. Nul besoin d’être devin pour comprendre que rien de cela ne se produira et c’est précisément ce qui fait le sel de ce portrait d’un loser magnifique. Benoît Poelvoorde incarne à merveille cette vulnérabilité à fleur de peau, source d’autant de moments tendres que burlesques, aidé par la joyeuse bande qui l’accompagne (François Damiens, Gustave Kervern, Camille Cottin…) se délectant des situations nées de la plume riche en fantaisie de Liberski. A l’image de son anti- héros, ce film est bourré d’imperfections, dont une fin larmoyante contredisant tout ce qui précède sans cependant abîmer cet air de folie douce qui rend l’ensemble si attachant.

Thierry Cheze

TOTEM ★★★☆☆

De Lila Avilés

La vie est douce, à sept ans. Sauf lorsque la maladie frappe à la porte. La petite Sol le sait : son père va mourir d’un cancer. L’air est lourd, grave, suffocant. Et pourtant, toute la famille se réunit pour fêter l’anniversaire de celui qui se rapproche un peu plus de la mort. Regarder Totem, c’est se remémorer un vieux souvenir d’enfance, celui où les cousins se bousculent dans une maison un peu trop petite, où les mères et les tantes portent toute la charge mentale du foyer, où le gâteau crame dans le four, où l’on s’égaye d’avoir son premier poisson rouge. Mais aussi, celui où l’enfance bien trop sensible sera bientôt endommagée par le deuil. Toute l’amertume de ce beau film à hauteur d’enfants réside en ce constat accablant : cette célébration sera le dernier souvenir que Sol aura de son père. Il est même possible d’entendre, au loin, le bruit d’un petit cœur qui se brise.

Lucie Chiquer

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

LE REPLI ★★☆☆☆

De Joseph Paris

Interrogé par des chaînes d’infos américaines le soir du 13 novembre, le militant des droits de l’homme Yasser Louati est sommé par les journalistes de “condamner” les attentats au nom des musulmans de France. Le premier d’une longue liste d’incidents racistes. Et alors que la France s’enfonce dans l’État d’urgence et la recherche d’un “ennemi intérieur” (vocable emprunté à l’extrême droite), le réalisateur Joseph Paris passe ici avec lui au peigne fin les soubresauts identitaires de la décennie précédente jusqu’à l’avènement d’un puissant racisme anti- musulmans. Ce message nécessaire, aujourd’hui porté par un nombre croissant d’intellectuels ( dont l’écrivain Aurélien Bellanger) est malheureusement brouillé par une forme tapageuse, qui abuse des musiques à suspense et du noir et blanc. Tant et si bien que l’on finit parfois par se croire dans un film d’espionnage aux relents vaguement complotistes. 

Emma Poesy

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

RIVIERE ★☆☆☆☆

De Hugues Hariche

Manon, joueuse de hockey fraîchement arrivée à Belfort dans l’espoir d’y trouver son père, croise la route d’une bande d’amis un poil casse-cou. Une bonne base pour un coming-of-age, qu’Hugues Hariche gâche hélas par la faiblesse de l’écriture de ses personnages féminins. En voulant autant aborder le lesbianisme que le sport ou même la santé mentale, il s’emmêle les pinceaux et finit par enchaîner les banalités.

Lucie Chiquer

 

Et aussi

Venom : The Last dance, de Kelly Marcel

Les Reprises

Les Enchaînés, de Alfred Hitchcock

Rebecca, de Alfred Hitchcock

Shaun of the dead, de Edgar Wright

When we were kings, de Leon Gast