Après nous avoir plongés dans l’envers white trash du rêve US dans The Other Side (2015), le cinéaste italien nous dévoile son contrechamp afro-américain. Nous sommes toujours dans le sud des États-Unis, en Louisiane, entre La Nouvelle Orléans et Baton Rouge. La méthode d’approche reste la même : une immersion intense au milieu de la population locale (obtenue en systématisant les longs plans-séquences), laquelle est captée dans des cadres si soignés qu’on se demande régulièrement si l’on n’est pas devant une fiction. Les « personnages » principaux ici : le chef Kevin de la communauté indienne de Mardi Gras, en pleine préparation de somptueux costumes ; Ronaldo, 14 ans, et son frère de 9 ans, Titus, qui philosophent sur leur avenir menacé par le marasme ambiant ; mais aussi Judy, charismatique célibataire en lutte contre la fermeture programmée de son bar ; et enfin Krystal Muhammad, l’actuelle présidente des Black Panthers, qui enquête sur les incessantes brutalités policières et manifeste au nom du Black Power. Tous subissent de plein fouet les maux de l’Amérique raciste de l’ère Black Lives Matter. Le film choisit de s’en scandaliser dans un écrin élégant, en noir et blanc, traquant l’épiphanie dans le sordide. Si le documentaire, arrimé à son constat édifiant, peine parfois à articuler cette galerie de portraits de manière surprenante, il saisit néanmoins quelques visions lumineuses au passage, tels ces vélos de protestants anti-gentrification scintillant au crépuscule.