Première
par Gérard Delorme
Le drame serait assez classique s’il n’exploitait une situation paradoxale qui oblige les amants à rester séparés malgré une très grande proximité... Selon l’étage, la surface, le décor et la fonction, les différents espaces de la maison donnent une signification particulière à chaque scène, qui peut être d’ordre social, politique ou psychologique beaucoup plus que symbolique. Ces décors servent surtout à déclencher d’infinies variations – parfois très réussies – sur le genre de situations où certains personnages voient et entendent ce que d’autres ne feraient jamais s’ils se savaient vus ou entendus. D’autres, à l’inverse, agissent en sachant pertinemment qu’il n’y a pas de témoins. Le tout pour la plus grande satisfaction du spectateur, à la fois juge et voyeur. Faute de moyens, Rabia ne donne pas la pleine mesure de ses possibilités, traitant seulement en surface certains thèmes (les carcans sociaux et familiaux) tout en se concentrant sur les conséquences du crime à un niveau individuel, pour finir sur un terrain moral. Esthétiquement, le film est intemporel, et il ne faut voir dans l’état de la maison qu’une indication du délabrement de ses habitants.