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Ca raconte quoi ? L’évocation cruelle des derniers jours à Versailles, entre panique et aveuglement. En s’inspirant d’un roman de Chantal Thomas, Benoît Jacquot choisit de raconter la révolution française côté Versailles. Mais derrière le portrait d’un monde qui tombe en ruine et s’écroule en parlant chiffons et froufrous, le cinéaste fait surtout le portrait d’une jeune (et jolie) lectrice de la reine, Sidonie, qui va tomber amoureuse de l'Autrichienne, déboussolée, ingrate et manipulatrice, elle-même éperdument amoureuse d’une courtisane. C'est avec qui ? Un trio sublime. Léa Seydoux subjuguante de beauté conduit le récit et impose sa résolution mélancolique avec une élégance folle. Diane Kruger en queen pop à la beauté aérienne trouve l’un de ses plus beaux rôles, le plus intense. Et Virginie Ledoyen évanescente, fantôme d’un outre-monde, fournit le prétexte à des scènes d'un érotisme suffocant.Nominations ? 10, comme Amour. Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur actrice, meilleure adaptation, meilleur décor, meilleurs costumes, meilleure photographie, meilleur montage, meilleur son et meilleure musique.Pourquoi fallait le voir ? Pour Léa Seydoux d’abord. Son pas cadencé, sa moue boudeuse, sa voix sensuelle… Jacquot a écrit le film pour elle, ça se voit. Elle éclipse tranquillement la Kruger, gagnant ici, une fois pour toutes, ses galons de star juste après avoir été le faire-valoir de Tom Cruise (la tueuse de MI4). Mais surtout, le film vaut le coup d'oeil parce qu'il s'agit du meilleur Jacquot aperçu depuis très longtemps (sérieux, vous avez vu Villa Amalia ?). Les Adieux à la reine réconcilie la fascination du cinéaste pour les damsel in distress qui se fracassent contre la cruauté du monde et son attrait pour le XVIIIe siècle (littéraire et pictural). C'est beau, sensuel, intelligent, troublant, d'une fluidité folle : Benoît Jacquot orchestre entre ces trois femmes (la reine, son amante, la lectrice) un trafic de sentiments avec une maîtrise et une grâce spectaculaires.Ca repart avec quoi ? Difficile à dire. Léa Seydoux a peu de chance de s’immiscer entre Cotillard et Riva. Pareil pour le César du meilleur réalisateur et du meilleur film : malgré toutes ses qualités, on imagine mal Jacquot triompher d’Audiard et de Haneke. D'autant que le film, sorti très tôt dans l'année (mars 2012), s’est un peu effacé des mémoires… On ne sous-estimera pourtant pas le fait que Les Adieux à la reine ait remporté en décembre dernier le prix Louis Delluc. En 2006 (Lady Chatterley), 2007 (La Graine et le mulet) et 2009 (Un Prophète), les prix Louis Delluc repartaient avec des brouettes de César... méfiance donc.Restent les récompenses techniques. Si dans ce registre, Jacquot doit se méfier de Cloclo et de Populaire, il part avec quelques atouts dans sa manche. Justement : Christian Gasc a déjà eu trois César pour les costumes de films historiques et on le voit bien repartir avec une compression dans les bras. Bruno Coulais, lui aussi récidiviste, pourrait rafler le César de la musique tandis que, même s'il se retrouve face à des poids lourds de la catégorie (Champetier, Khondji et Schifman), il n'est pas exclu que le chef op Romain Winding remporte le César de la meilleure photographie.L'équation win des César :Marina Hands (révélée et césarisée pour son rôle dans Lady Chatterley) + Patrice Leconte (double César du meilleur film et du meilleur réalisateur pour Ridicule, autre film sur la Révolution) x Lady Chatterley (film en costume qui a raflé le Prix Louis Delluc puis, outre celui de la meilleure actrice, les César du meilleur film, de la meilleure adaptation, de la meilleure photo et des meilleurs costumes) = un potentiel maximum de 6 César.GGCésar 2013 : quelles sont les chances d'Amour ?César 2013 : quelles sont les chances de De rouille et d'os ?