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L'affaire fait du bruit car elle n'est pas nouvelle. La célèbre chanteuse de R&B, Beyonce, se fait accuser pour la deuxième fois en quelques mois de plagiat chorégraphique. Et pas des moindres, puisque la source d'inspiration de son dernier clip Countdown provient du répertoire d'une des plus éminentes chorégraphes flamande, Anne Teresa de Keersmaeker.Les affaires de plagiat, qu'ils soient littéraires, musicaux ou chorégraphiques, sont délicates à débroussailler car, on le sait, l'art n'est pas une science exacte et la frontière entre source d'inspiration, emprunt, citation ou simple copier-coller est parfois difficile à démêler. Or, dans le cas du clip Countdown, il n'est pas difficile d'identifier le plagiat tant certaines séquences sont des copies conformes des captations réalisées par Thierry de Mey des pièces Rosas danst Rosas et Achterland signées Anne Teresa de Keersmaeker. Non seulement la gestuelle chorégraphique reprend celle, unique, de la chorégraphe, mais le décor, les costumes, les angles de caméra sont également d'une similitude évidente. Anne Teresa de Keersmaeker, directrice de la compagnie Rosas, a saisi son avocat pour examiner les recours possibles d'une part et d'autre part, a répondu personnellement à la chanteuse américaine dans un communiqué exprimant son point de vue sur l'affaire. La chorégraphe se dit heureuse que son œuvre puisse par ce biais toucher un public plus large, gratifiant au passage la chanteuse sur ses qualités de danseuse. Cette affaire ne l'a pas mise en colère mais au contraire, lui a permis de réfléchir à certaines choses et à se poser des questions : 30 ans sont-ils nécessaires à un spectacle pointu et expérimental pour accéder à une reconnaissance internationale ? En effet, Rosas danst Rosas date de 1983 et fut l'équivalent d'une petite révolution dans le monde de la danse contemporaine mais sa réputation n'a pas dépassé les cercles de connaisseurs en ce domaine. Et, deuxième question : quel éclairage apporte cette "reprise" à l'œuvre originale qui se positionnait comme féministe à l'époque ? Anne Teresa de Keersmaeker ne voit dans le clip de Beyonce qu'une œuvre séduisante à vocation divertissante, sans plus. La conclusion, en revanche, souligne une amusante coïncidence : Beyonce dans le clip Countdown et Anne Teresa de Keersmaeker dans le film de Thierry de Mey utilisé, dansent toutes les deux alors qu'elles sont enceintes de quatre mois. Ainsi, la chorégraphe conclut sur des vœux de bonheur maternel à l'intention de la chanteuse. Voilà une femme qui sait faire valoir ses droits en tant qu'artiste sans oublier son sens de l'humour et de l'à-propos. Une belle réaction.