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Le petit-fils d’Achille Zavatta revient avec son excellent spectacle Ce soir dans votre ville !, dans lequel il raconte à sa manière le monde « féerique et merveilleux » du cirque qui l’a vu grandir.Propos recueillis par M.-Céline NivièreDerrière son nez de clown, Pépé n’était visiblement pas un marrant.C’est vrai ! J’ai encore le souvenir du procès qu’il a fait à ses enfants (ndlr, interdiction que leur cirque porte le nom de Zavatta). J’avais 10 ans, la douleur de mon père m’a marqué. A 18 ans, je lui ai demandé du boulot, même le plus petit. Il m’a répondu : « On verra. » C’est la dernière fois que je l’ai vu. En fait, j’ai connu l’inverse de l’image qu’il renvoyait. Ses amis m’ont dit qu’il était génial, donc il faut croire que quand on est de la famille, la vision n’est pas la même.Vous jonglez avec vos souvenirs, avec les massues de la colère et les balles de l’émotion.Mon spectacle est un mélange de l’amour que je porte à ce métier et de ma tristesse de ne pas y avoir trouvé ma place. J’ai mis des années à l’écrire. J’avais l’axe, mais il m’a fallu du temps pour mettre tout cela en place. Je montre tout ce que j’ai appris gamin, pour mieux le démolir après.Etre un enfant de la balle, c’est subir un dressage avant d’entrer en piste.Au cirque, le schéma familial est le suivant : les parents font le numéro, les enfants apprennent et quand les parents ne peuvent plus, les enfants reprennent la suite. C’est dur, mais à côté des gamins en Chine, ce n’est rien. Cela demande une exigence. Il y a des jours où je n’avais pas envie… En juillet et en août, on faisait une ville par jour… Démonter le chapiteau, reprendre la route, puis remonter, afficher, faire le tour de la ville avec la voiture publicitaire, nourrir les animaux… Ce n’est pas un métier de fainéant.Finalement, votre « talent d’Achille » est d’avoir réussi à quitter la piste pour la scène ?Dans le spectacle, je dis cette phrase : « J’ai quitté la sciure du cirque pour les planches du théâtre, mais tout ça, c’est fait du même bois. » Cela n’a pas été facile, parce qu’en France on aime bien cloisonner. J’ai travaillé pendant cinq ans avec Steve Kalfa. Pour faire de la scène, il faut une formation. J’avais besoin d’apprendre. Le one-man-show réclame une sacrée énergie. On est tout seul et tout repose sur soi.Le succès de Ce soir dans votre ville ! vous a obligé à reprendre la route…Je viens effectivement de faire une tournée de cent cinquante villes, c’est beaucoup. J’ai trouvé la tournée théâtrale plus difficile que celle du cirque. Plus de roulotte, tu enchaînes les hôtels… J’en ai perdu ma famille en route. Quand on arrive dans une ville, c’est un peu l’événement. A Paris, il y a le syndrome tour Eiffel. L’offre est tellement vaste que l’on n’est pas obligé de venir. Il y a le choix.Et c’est l’auguste ch’ti, Dany Boon, qui vous produit ?C’est une très belle rencontre. Il est venu me voir au Trévise. Après le spectacle, il entre dans ma loge et propose de me produire. J’avais déjà été contacté par d’autres mais lui, il a dit le truc magique : « Qu’est-ce que tu veux faire ? » Alors que pour les autres le leitmotiv était : « On va faire ça et surtout on ne va pas faire cela. » Dany, c’est un artiste, il te laisse une grande liberté et, en même temps, il te protège.Votre metteure en scène, Anne Bourgeois, est une dompteuse de sentiments, d’énergie ?Je l’ai rencontrée chez Steve où elle enseignait l’art du clown théâtral. Le nez rouge est le plus petit masque de comédie. C’est une femme extra qui travaille en finesse, n’imposant rien et qui finalement ne se trompe jamais. Elle a apporté une douceur que je n’avais pas au début.Après ce dernier tour de piste avec le cirque, place au théâtre avec un grand T ?Oh oui, j’ai envie de jouer avec d’autres, des grands classiques évidemment. Cela ne va pas être facile, car de retravailler à plusieurs fait un peu peur. En tout cas, ce jour-là, j’aurais vraiment coupé le lien. Car là, même si j’égratigne l’icône, je me sers encore du grand-père.Warren Zavatta au Théâtre le Temple>> Réservez vos places pour le spectacle !