Le MCU retrouve enfin de la chair avec la suite de Black Panther. Notre avis sans spoiler.
Toute (tentative de) critique d’un film du Marvel Cinematic Universe commence invariablement par l’aveu d’une lassitude : celle ressentie face à des films qui sont depuis longtemps complètement critique-proof, comme un parapluie l’est à l’eau ou un gilet peut l’être aux balles. Que le rapport des films du MCU envers son public soit complètement détaché de son accueil critique, soit ; il n’en reste pas moins épuisant de tenter de les juger en termes de cinéma, tant leur logique de conception s’est complètement détachée de la notion même d’auteur. On peut très bien faire un excellent film de studio sans présence d’auteur, mais la méthode Marvel confirme encore et toujours qu’on peut très bien se passer d’un investissement sincère artistique pour accoucher d’un blockbuster. La présence du nom de Sam Raimi à la réalisation du plutôt rigolo Doctor Strange in the Multiverse of Madness étant un effet de générique, au même titre que les prétentions de Taika Waititi à être un auteur (l’incohérence quasi irregardable de Thor : Love and Thunder). Le découragement critique face aux films en salles est amplifié par l’éparpillement des super-séries sur Disney+, fatigantes et chronophages. Bref, Black Panther : Wakanda Forever fait figure de Messie, arrivant juste à temps pour sauver l’année Marvel.
Pourquoi Black Panther 2 n'aura pas de scène post-génériqueEt ce n’est pas seulement le couronnement d’un borgne au royaume des aveugles : pendant une heure, le film est vraiment formidable. L’ouverture endeuillée déclenche une intrigue géopolitique vraiment pas bête, à l’intensité mesurée comme celle d’un thriller 90’s. L’excellente scène d’attaque d’une station pétrolière, où l’on oublie presque qu’on est dans un Marvel, donne au film un ton beaucoup plus lo-fi qu’on aurait pu croire. Une gravité qui ne s’explique pas seulement par la disparition de Chadwick Boseman, qui pèse évidemment sur tout le film, mais bien par la sincère implication du réalisateur Ryan Coogler qui est désormais le seul chez Marvel à investir autant un film -tout comme son casting, essentiellement des femmes, toutes réellement impliquées dans ce Wakanda devenu un refuge de fiction, une fragile tour d’ivoire qui se révèle proof à rien du tout. Et surtout pas au poids des contraintes Marvel, qui finissent par rattraper le film dans un dernier tiers en forme de bataille rangée numérique sans véritable enjeu, à laquelle personne ne fait semblant de croire. Cela n’entame pas la solidité réelle de Black Panther 2 en tant que divertissement d’aventure et vrai bon film de superhéros, qui se permet même de se moquer de lui-même en créant un Wakanda bis, un royaume aquatique mené par le charismatique Namor (la relecture d’un des plus vieux superhéros Marvel façon souverain maya est d’ailleurs brillante). On en sortirait presque avec une confiance renouvelée dans l’avenir du MCU, capable de laisser s’y investir des auteurs de films. Est-ce que ça va durer ?
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