Dans une interview qu’il a accordée à Première, Bertrand Blier évoquait Les Valseuses, diffusé dimanche soir sur France 2.
France 2 rediffuse ce dimanche Les Valseuses, le chef d’œuvre de Bertrand Blier. Corrosif et provoc’, le film l’était et le reste comme en témoigne sa programmation discrète en deuxième partie de soirée. 45 ans plus tard, Les Valseuses est toujours une bombe à retardement qui a valu pas mal de problèmes à son auteur. Il nous en parlait récemment, à l’occasion de la sortie de son dernier film, Convoi exceptionnel.
Vos personnages féminins sont particulièrement maltraités dans vos films, qui contiennent un nombre de baffes considérable. Les Valseuses n’échappe pas à la règle. Vous ne pourriez plus tourner ça aujourd’hui.
Mais j’ai été énormément attaqué à l’époque ! Il y avait des filles devant les cinémas projetant Les Valseuses avec des pancartes où il était écrit : « N’allez pas voir cette merde ! » Ça m’a poursuivi jusqu’à Préparez vos mouchoirs. L’Oscar [du meilleur film étranger, obtenu en 1979] a calmé un peu tout le monde.
La vision machiste des femmes qu’ont les hommes dans vos films, du moins au début, est-elle le produit d’une époque ?
Certainement, mais avant tout de mes lectures de romans noirs. Mon père avait eu la bonne idée de faire construire une bibliothèque dans ma piaule pour ranger ses livres. En grandissant, j’ai commencé à m’y intéresser. Vu qu’il y avait dans le tas des titres comme Vipère au sein de James Hadley Chase, je me les suis tous tapés ! (Rires.) Richard Matheson, Jim Thompson, Raymond Chandler, tous ces gens-là, ça bourre un peu le crâne. Les femmes y prennent des coups, sont roulées dans le caniveau, tuées...
Vous avez dit que vos films n’étaient pas pour des « acteurs normaux ».
J’ai dit beaucoup de conneries. (Rires.)
C’est quoi un acteur à la Blier ?
Un fou furieux, qui aime le texte et les dialogues. Depardieu n’est pas normal, c’est un monstre. Serrault et mon père aussi. Dans Buffet froid, papa est extraordinaire. C’est d’ailleurs un film sur sa mauvaise humeur, sur son côté crapule.
Que vous êtes-vous dit quand vous avez rencontré ces deux types pour Les Valseuses ?
Que j’avais eu la main heureuse même si je ne me doutais pas qu’ils deviendraient d’aussi grandes stars. Je me sentais plus à l’aise avec Patrick, qui avait un truc fantastique : il ressemblait à Marcello Mastroianni, mon idole. Il me touchait beaucoup, Patrick. Il avait du malheur en lui – on sait aujourd’hui qu’il a été victime d’abus sexuels dans son enfance. Gérard était plus aride, c’était un paysan avec, déjà, un sacré caractère.
On imagine qu’en plus de la peine que la mort de Dewaere vous a causée, vous vous êtes dit que vous alliez devoir faire plein de films sans lui ?
Exactement. Tenue de soirée, c’était un film Depardieu-Dewaere dont j’ai eu l’idée sur Les Valseuses. Je leur avais dit pendant le tournage que si jamais, un jour, on était dans la merde, on ferait Rimmel [le premier titre de Tenue de soirée]. J’étais persuadé, là aussi, de tenir un succès. Quand Patrick est mort, j’ai évidemment pensé jeter Rimmel à la poubelle. Puis, j’ai envisagé Bernard Giraudeau dans le rôle, qui m’a lâché à quinze jours du début des prises de vues. C’était la merde. Prendre Michel Blanc a finalement été une idée de génie.
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