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Claude Pinoteau, est mort vendredi matin à l'âge de 87 ans des suites d'une longue maladie. Célèbre pour trois films (La Gifle, La Boum, L'Etudiante) qui, avec une belle constance, infusaient ses obsessions dans le registre de la comédie, Pinoteau était, comme ses copains de promo Edouard Molinaro ou Georges Lautner, un artisan du cinéma populaire doublé d'un cinéphile passionné.Né en 1925, à Boulogne-Billancourt, Pinoteau grandit à Neuilly dans une famille de cinéma. Le père, Lucien, est régisseur ; la grande sœur, Arlette Merry comédienne et le grand frère, Jack, devient très vite réalisateur – on lui doit notamment Le Triporteur qui imposa Darry Cowl. Claude, le petit dernier, prend son temps. Il débute comme coursier pour Duvivier, puis accessoiriste avant de passer assistant réalisateur. A ce poste, il travaillera pour les plus grands : Max Ophuls, Jean Cocteau, Jean-Pierre Melville, René Clair ou Henri Verneuil, préférant, comme il le disait dans ses mémoires, « être second à Rome que premier dans (son) village ». Il fréquente les meilleurs acteurs de l'époque, apprends la technique, la direction et la mise en scène dans l'ombre des géants avant de sauter le pas au début des années 70. C'est son ami Lino Ventura qui lui met le pied à l'étrier et l'engage pour réaliser Le Silencieux. Au début très réticent (il ne croyait pas au scénario), Ventura finit par le convaincre. L'acteur lui aurait mis une vraie pression : « tu vas faire ce film, parce qu'on est d'accord tous les deux. Ça t'ennuie de travailler avec Jean-Loup Dabadie ? D'avoir comme producteur la maison Gaumont ? Et Lino Ventura comme acteur ? ». Résultat ? Un thriller hitchcockien nerveux et haletant, qui surfe sur la paranoia 70's avec une certaine maitrise et offre un des plus beaux rôles de Ventura. Le succès est immédiat et on le pense taillé pour le polar. Pinoteau aurait pu devenir un sous-Verneuil et ses deux autres thrillers (versant comédie avec Le grand escogriffe avec Montand et plus sérieux sur Un Homme en colère avec Ventura) laissent penser que sa carrière est tracée. Mais en 74, le cinéaste signe La Gifle. Isabelle Adjani est une étudiante en médecine écervelée et Ventura son papa vieux jeu mais sympa. Pinoteau met en scène ce conflit éternel en captant l'air du temps et La Gifle devient un succès populaire, une comédie sociale qui marque surtout les obsessions d'un cinéaste (on n'a pas dit auteur - quoique) : les premières fois et le rapport père/fille. En gros ce qui intéresse le cinéaste, c'est comment perdre son pucelage sans énerver son père. Ce sont ces mêmes thèmes qu'on retrouvera dans La Boum (scénarisé par Daniele Thompon) réalisé six ans plus tard et qui devient pour le coup un phénomène générationnel (à coup de 7 millions d'entrées). Pinoteau aidé par les mélodies de Cosma et le couple Brasseur / Fossey, capte miraculeusement la jeunesse des années 1980. Surtout, La Gifle et La Boum offrent à chaque fois une promesse, une vraie découverte : Pinoteau possède un talent incomparable pour dénicher des actrices et sa caméra invente à six ans d'écart Isabelle Adjani et Sophie MarceauLa Boum 2 et L'Etudiante tenteront de retrouver la recette du succès, un peu en vain. Suivront dans les années 90 La Neige et la cendre (love story sur fond de seconde guerre mondiale), Cache Cash (portrait d'enfant de Sologne) et l'adaptation des Palmes de M. Schultz. Mais pour toujours, Pinoteau reste lié à La Gifle et La Boum. Une claque, une soirée et deux actrices majeures.