Aujourd'hui à Cannes : Xavier Dolan prend sa revanche, Ken Loach est toujours de gauche et Asia Argento est Incomprise

Grand jour pour le jeune réalisateur Xavier Dolan qui est enfin en Compétition avec son cinquième film Mommy. Première fois en lice pour la Palme d'or, ce qui ne l'empêche pas d'être habitué depuis ses débuts à la Croisette. Son premier film J'ai tué ma mère avait été présenté à la Quinzaine des réalisateurs puis le second Les amours imaginaires marquait son entrée dans la Sélection officielle, présenté à la catégorie Un certain regard, tout comme Laurence Anyways. Le 67ème festival de Cannes signe la revanche de Dolan qui attendait avec impatience cette nomination. L'histoire de cette mère (incarnée par Anne Dorval, déjà la mère de Xavier Dolan dans J'ai tué ma mère et celle de Niels Schneider, le fantasme des Amours imaginaires) qui prend seule en charge son enfant au comportement violent a enthousiasmé Gilles Jacob : "Un film extrêmement cohérent mais aussi assez fou, assez débridé, qui va rajouter des couleurs, des sons". L'autre candidat face à lui est un vétéran, hôte chéri du festival. Ken Loach présente son douzième long-métrage en compétition officielle et ce qu'il déclare être son dernier film de fiction, Jimmy's Hall. Le réalisateur reprend sa formule gagnante, Irlande et politique, qui lui avait valu une palme d'or en 2006 avec Le vent se lève, en se penchant sur le leader communiste Jimmy Gralton connu pour avoir été le seul exilé politique irlandais. Il se concentre sur son retour dans son Irlande natale en 1932 après dix ans d'exil aux Etats-Unis et dix ans après la guerre civile. Gralton décide de rouvrir le "Hall", un foyer de jeunesse gratuit et ouvert à tous où l'on se retrouve pour danser, étudier ou discuter, sans accorder d'importance aux vieux ennemis, l'Eglise et les propriétaires terriens. Il s'agit encore d'engagement du côté de la catégorie Un certain regard avec Charlie's Country de Rolf de Heer. Le réalisateur australien d'origine néerlandaise se penche sur l'histoire de Charlie, un guerrier qui n'est plus au mieux de sa forme, habitant dans une communauté aborigène éloignée au nord de l’Australie. Au fur et à mesure que le gouvernement renforce son contrôle sur la manière de vivre traditionnelle de la communauté, Charlie se perd entre deux cultures. Ce n'est pas la première fois que Rolf de Heer s'intéresse à la communauté aborigène puisque l'on peut noter dans sa film The Tracker sur son histoire tragique et violente ainsi que 10 canoës, 150 lances et 3 épouses qui ne comporte que des acteurs amateurs aborigènes. Ce n'est pas non plus la première fois que le réalisateur se retrouve à Cannes : le dernier film cité avait été sélectionné en 2006 dans la catégorie Un certain regard. Il avait été aussi deux fois en lice pour la Palme avec La chambre tranquille en 1996 et Dance me to my Song en 1998.Dix ans après Le livre de Jérémie présenté à la Quinzaine, Asia Argento débarque coiffée de la casquette de réalisatrice dans la catégorie Un certain regard pour présenter L'Incomprise, son troisième long métrage autobiographique. La petite Giulia Salerno est dans la peau d'Aria (le vrai prénom d'Asia), petite fille tourmentée par les querelles familiales qui trouve une échappatoire dans les rencontres et les expériences diverses. Asia Argento a réuni un beau casting pour incarner les parents : Charlotte Gainsbourg en maman lookée comme une princesse et Gabriel Garko en papa beau comme un mannequin. Une bande-annonce pop et acidulée, entre mélancolie et fraîcheur, rythmée par les frasques de la fillette révèle l'ambiance du film.  La Hors Competition présente aujourd'hui son documentaire collectif Les Ponts de Sarajevo avec Jean-Luc Godard parmi les signataires qui présente aussi en Compétition officielle son Adieu au langage. Treize cinéastes européens explorent ce que Sarajevo représente dans l’histoire européenne depuis un siècle et ce qu’elle incarne dans l’Europe d’aujourd’hui. De générations et d’origines diverses, ces auteurs marquants du cinéma contemporain proposent autant d’écritures et de regards singuliers.On passe au thriller avec The Target du réalisateur sud-coréen Chang. Remake d'A bout portant, le film retrace l'histoire d'un infirmier, Tae-Joon, qui se voit dans l'obligation de faire équipe avec Yeo-Hoon, un tueur à gages, lorsque sa femme se fait kidnapper. La séance de minuit risque d'être bien mouvementée! Cannes classic programme un Alfred Hitchcock, cela ne fait jamais de mal. La Taverne de la Jamaïque se déroule à la fin du XVIIIème siècle en Angleterre. Le film raconte l'histoire de Mary qui se rend dans une étrange auberge dans les landes de Cornouailles appartenant à sa tante. Elle découvre qu'il s'agit du repère des pirates et des écumeurs des flots de la région commandés par sir Humphrey. Amoureux de la jeune fille, celui-ci, pour arriver à ses fins, l'enlève et l'entraine en mer... La Quinzaine des réalisateurs nous offre aussi un classique, en plus sanglant. Il s'agit de fêter les trente ans du film d'horreur culte Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper. Trois garçons, Franklin, Jerry, Kirk et deux filles, Pam et Sally décident d'aller passer quelques jours dans une région retirée du Texas...Et elle ne change pas de registre en projetant Alleluia de Fabrice du Welz inspiré d'un fait divers, l'affaire Raymond Fernandez et Martha Beck alias "les tueurs des petites annonces", coupables des meurtres de vingt jeunes femmes. La passion des personnages Gloria et Michel, née grâces aux petites annonces, va basculer dans la folie meurtrière. Le réalisateur est connu pour son goût pour les films d'horreur. Son premier long-métrage Calvaire, présenté à la Semaine de la critique en 2004 et décoré du Prix du Jury redonnait vie au genre, mettant en scène un personnage perdu dans un milieu hostile et se retrouvant à la merci d'un psychopathe. Bien entendu, Fabrice du Welz avait avoué s'être inspiré pour cette réalisation d'un des classiques du genre... Massacre à la tronçonneuse. Etre programmé le même jour que son idole, il en rêvait sans doute, la Quinzaine l'a fait.Prêt à frissonner?