Première
par Thomas Agnelli
Kat, 17 ans, ne comprend pas pourquoi sa mère s’est volatilisée par un après-midi glacé de janvier. Au cœur de cette période trouble où elle découvre sa sexualité, elle est alors assaillie de doutes et de visions qui la conduisent à s’interroger sur cette disparition. Après l’apocalypse jouissive de "Kaboom", Gregg Araki retrouve la veine sérieuse de son génial "Mysterious Skin" et, toujours dans un style pop fluo, colorise un roman noir et trouble de Laura Kasischke. Avec cette héroïne travaillée par le désir et la culpabilité (Shailene Woodley), il sonde l’adolescence des années 80, celle qui écoutait les Cocteau Twins sur son baladeur, sans portable ni Facebook. Si l’on retrouve ici les archétypes du teen movie qu’Araki adore (l’amie rebelle aux mèches bleues, le pote homo, le play-boy torturé...), on est étonné de le voir lorgner vers David Lynch en reprenant certains de ses cauchemars récurrents (comme l’Amérique pavillonnaire fissurée, les rêves de putréfaction), allant même jusqu’à proposer un caméo à Sheryl Lee, la Laura Palmer de "Twin Peaks". On est surtout bluffé par son portrait pathétique et touchant d’une desperate housewife tirée à quatre épingles, qui offre à Eva Green son meilleur rôle.