Critique pour diverses revues spécialisées (les Temps modernes, la Gazette du cinéma, la Revue du cinéma, Arts, etc.), puis rédacteur en chef des Cahiers du cinéma de 1957 à 1963, Éric Rohmer est d'abord, durant les années 50, l'auteur d'articles subtils sur Rossellini, Hawks, Renoir ou Mizoguchi et le signataire, avec Claude Chabrol, d'un essai sur Hitchcock (1957). Paradoxalement, puisqu'il est à la fois l'aîné du groupe issu des Cahiers et le premier à se lancer (dès 1950) dans la réalisation, il est aussi celui qui devra attendre le plus longtemps pour se voir reconnaître hors des cercles de cinéphiles avec Ma nuit chez Maud (1969). Universitaire (il a publié une thèse de doctorat sur l'Organisation de l'espace dans le « Faust » de Murnau), il partage toujours son activité entre l'enseignement du cinéma à l'université et la réalisation de ses propres films, après avoir signé de nombreuses émissions pour la télévision scolaire (1964-1969).Une première phase de sa carrière, exploratoire et peu déterminée encore, comprend aussi bien de courts essais qu'une fable morale très personnelle : le Signe du Lion (1962 RÉ 1959), dont la vision du Paris désert de l'été annonce déjà l'intérêt extrême que portera Rohmer aux lieux et aux temps où il situe ses intrigues.Outre une série de films réalisés pour la télévision et quelques courts métrages, son uvre s'organise ensuite pour l'essentiel en deux cycles clairement identifiés en emprunt à la littérature : Six Contes moraux (1962-1972) et Comédies et Proverbes (depuis 1980), qui explorent avec autant d'humour que de rigueur les champs de la foi, de l'éthique et des valeurs sociales. Ainsi les Six Contes moraux se présentent-ils comme une série de variations où, de chroniques hivernales en comédies estivales, les protagonistes confrontent l'apparente liberté de leurs actes aux exigences de leur morale et se cherchent quelque part entre la foi chrétienne, le pari pascalien, la certitude mathématique et la tentation libertine. Tranquillement à contre-courant des modes, Rohmer en fait un ensemble brillant et secret, uniformément commenté à la première personne.Poursuivant cette quête morale en la doublant d'un débat sur les notions de transparence (au sens où l'entendait Bazin) et de représentation, Rohmer entreprend ensuite la transposition à l'écran d'une nouvelle de Kleist (dont il dirigera trois ans plus tard pour le théâtre et la télévision Catherine de Heilbronn), la Marquise d'O... (1976). Il s'inspire de la peinture romantique, de ses formes et de sa lumière, pour « rendre l'uvre à son temps » et en resituer le pathos dans les artifices de la représentation. De même, Perceval le Gallois (1979) conserve l'octosyllabe rimé et la représentation non perspective du Moyen Âge pour retrouver l'esprit de l'uvre de Chrétien de Troyes (déjà traitée par Rohmer quinze ans plus tôt à la TV) dans une fidélité audacieusement littérale qui tourne le dos aux conventions du « réalisme » cinématographique. Inversement, le cycle des Comédies et Proverbes accepte une modernité sans références éthiques ni religieuses. Non sans égarements, les personnages de la Femme de l'aviateur (1981), le Beau Mariage (1982), Pauline à la plage (1983), les Nuits de la pleine lune (1984), le Rayon vert (1986) et l'Ami de mon amie (1987) tentent d'accorder leur désir amoureux non plus à des exigences spirituelles, mais aux normes d'une société bourgeoise. Nouvelle éducation sentimentale où la liberté, le libertinage et le mariage constituent des modèles imaginaires et idéologiques. Contrepoint nécessaire des Contes moraux dans leur exploration des règles d'un jeu nouveau qui n'exclut aucun possible, les Comédies et Proverbes s'interrogent sans pesanteur aucune sur la substitution à une morale d'un système de normes sociales. À la voix off des Contes, commentaire distancié des comportements et des choix, se substituent des dialogues omniprésents. Reste, dans les Comédies comme dans les Contes, un effacement de la représentation qui passe par l'acceptation paisible des conventions de la fiction pour mieux traquer une vérité fugitive dans la justesse d'une lumière, d'un lieu, d'un moment, le grain d'une peau ou la grâce inattendue d'un mouvement. En 1990, Éric Rohmer propose un nouveau cycle : les Contes des quatre saisons. Le premier volet, Conte de printemps, cerne avec transparence et équilibre les élans du cur et les conversations d'une certaine jeunesse contemporaine. Il s'agit là, peut-être, d'un nouvel exemple de comédie sentimentale à la française, à peine voilée d'amertume, une manière de filmer à la fois discrète et efficace qui permet au dialogue même le plus banal et au jeu limpide des acteurs de s'inscrire dans l'ordre paisible des choses.Eric Rohmer est décédé le lundi 11 janvier 2010.
Nom de naissance | Eric Rohmer |
---|---|
Naissance |
Tulle, Corrèze, France |
Décès | |
Nationalité | Français |
Genre | Homme |
Profession(s) | Réalisateur/Metteur en Scène, Scénariste, Dialogue |
Avis |
Biographie
Filmographie Cinéma
Année | Titre | Métier | Rôle | Avis Spectateurs |
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2015 | Le Canapé Rouge | Réalisateur | - | |
2015 | Bérénice (court métrage) | Réalisateur | - | |
2007 | Les amours d'Astrée et de Céladon | Réalisateur, Scénariste | - | |
2004 | Triple agent | Réalisateur, Scénariste | - | |
2001 | L'Anglaise et le duc | Réalisateur, Scénariste | - |
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