Les deux créateurs nous révèlent leur vision et pourquoi la série s'achève en 1997 : "Cela nous paraissait un bon endroit pour clore la saga d'un homme qui était à la fois victime et coupable."
Après l'ascension, la chute. La série Tapie raconte les grandes heures du chanteur devenu homme d'affaires devenu ministre devenu président de l'OM. Mais elle raconte aussi sa descente aux enfers... Attention spoilers !
Cette chute inéxorable commence par son éviction humiliante du monde politique, remercié sans ménagement par Mittérand et son Gouverment après quelques mois seulement au Ministère de la Ville. Quelques temps plus tard, après avoir gagné la Ligue des Champions, Bernard Tapie est rattrapé par l'affaire OM-VA et dans un final magistral, en forme de huis-clos étouffant, dans le cadre étriqué du bureau du juge d'instruction Éric de Montgolfier, il va sombrer. Le juge ne va pas lui faire de cadeaux. Lui ne se laissera pas corrompre ou manipuler. Et il va l'envoyer derrière des barreaux, de manière froide et méthodique. La série Tapie finit donc ainsi, en 1997, à la prison de la Santé.
"Depuis le début, on savait qu'on voulait finir là-dessus", révèlent Tristan Séguéla et Olivier Demangel à Première. Les deux créateurs de la série Netflix nous expliquent leur vision :
"Pour nous, Tapie, c'est l'histoire d'un prolo qui s'extrait de sa condition et qui est ramené finalement à sa condition initiale. L'histoire de Bernard Tapie, c'est un peu une histoire de lutte des classes. On aurait pu raconter ce qu'il a vécu après - c'est intéressant aussi - mais cela aurait été complètement autre chose. Du point de vue de la parabole, de la vision morale qu'on avait du personnage, cela nous paraissait un bon endroit pour clore la saga d'un homme qui était à la fois victime et coupable."
Et Laurent Lafitte de renchérir : "Ce qui est génial dans cette scène, c'est qu'il sort toutes ses armes ! L'entourloupe, le charme, la menace, le pathos... Il est arrivé dans sa dynamique habituelle, en mode : je vais le bouffer, ce petit fonctionnaire, je vais le retourner et puis ce sera réglé. Ben non, pas du tout !"
Tristan Séguéla et Olivier Demangel nous confient aussi pourquoi ils ont choisi de ne pas montrer le procès qui s'ensuivra dans la réalité, mais de rester sur cette scène, dans le bureau d'Éric de Montgolfier, qui met fin à l'ascension de Tapie en une seule soirée et une confrontation hyper-dramatique :
"On a un être qui est constamment debout, en train d'avancer. Mais là, à cet instant, ce juge l'oblige à s'asseoir. Ensuite, Éric de Montgolfier lui met la lampe dans le visage, ce qui est vrai. Cela s'est vraiment passé. Faisant ça, il voulait le mettre, déjà, dans la position de l'accusé. D'ailleurs, cette scène est assez proche de ce qui s'est passé dans la réalité. Leur échange a duré une quarantaine de minutes, en fin de journée. Lui arrivait dans ce bureau à Valencienne pour mettre un coup de pression. Et il tombe sur plus fort que lui, cette incarnation de la haute société et une forme d'aristocratie contre laquelle il avait toujours triomphé par le passé."
Tristan Séguéla nous confie s'être alors inspiré du livre Crimes et Châtiments de Dostoïevski, "où il y a ce même genre de scène : Raskolnikov arrive très fort dans le bureau du juge et repart au bord des aveux. Du coup, j'ai isolé cette scène du script, je l'ai écrite à part, un peu comme une pièce de théâtre. On a un Tapie en pleine puissance, tout juste marié, quasi maire de Marseille et qui vise la Présidence de la République. Plus personne ne sait où il va... Et cette scène de dialogues permet en fait de ne pas raconter le procès : quand il sort de ce bureau, c'est déjà fini."
Tapie, à voir en ce moment sur Netflix.
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