Une fournée d’épisodes où brille Juno Temple, et qui raconte l’implosion en cours des États-Unis. La meilleure saison depuis la première ?
Encore sonnée par le mandat de Donald Trump, Hollywood a à peine pris le temps de de traiter ses nombreuses répercutions. Comme une préparation au film Civil War d’Alex Garland, qui racontera dans quelques mois l’effondrement total des États-Unis, le showrunner Noah Hawley garde la recette originale de Fargo mais fait un pas de côté pour ausculter une Amérique au bord de l’implosion, où chacun vit en vase clos. « Le monde devient comme ça. C’est voisin contre voisin », dit à un moment Dorothy Lyon (Juno Temple, épatante de versatilité), héroïne de cette nouvelle fournée d’épisodes qui joue habilement avec le cliché du « Minnesota nice » - un stéréotype sur les habitants de l’État, forcément courtois, réservés et incapables d’exprimer leurs émotions.
Nous sommes en 2019 - jamais Fargo ne s’était autant rapprochée du présent -, en plein milieu du règne de Trump, et Dorothy est donc une mère au foyer souriante, a priori sans histoires, qui se fait rattraper par son passé : soudainement kidnappée au petit-déjeuner, elle parvient à se libérer au prix de pas mal d’audace et d’une étonnante capacité à manier les armes… Son évasion musclée fait deux morts, à la fois chez les ravisseurs et les policiers qui passaient par là. Au milieu de la nuit, en sang, Dorothy réapparait pourtant chez elle en assurant avec aplomb que rien de spécial ne s’est passé… Son mari n’y comprend goutte, pas plus que les flics du coin ou que son infecte et richissime belle-mère (Jennifer Jason Leigh), évidemment alertés par cette disparition soudaine. Mais que cache cette femme ?
Système agonisant
Plus loin, dans un ranch du Dakota du Nord, on fait connaissance avec Roy Tillman (Jon Hamm, assez exceptionnel), shérif grenouille de bénitier avec sa propre conception de la loi. « On m’aime parce que je dis ce que je veux et que je fais ce que je veux », lâche, entre deux citations de versets de la Bible, ce pur produit trumpien amoureux de la Constitution. Fièrement plouc et ivre de sa toute-puissance, le misogyne et raciste patenté veut remettre la main sur sa femme, Nadine, disparue du jour au lendemain, qui se fait désormais appeler… Dorothy.
Ces deux mondes ne cessent de s’entrechoquer violemment au cours de cette saison 5 particulièrement réussie, qui, à travers ses ruptures de ton inattendues (vraiment inattendues) et une écriture ciselée, parvient à conserver son humour noir tout au long de ses dix épisodes.
Hawley y raconte comment le nouveau rêve américain de Trump a transformé ses habitants en bébés colériques, incapables de faire société, prêts à sortir les armes à la moindre contrariété. Et les premières victimes de ce système agonisant sont les femmes (sauf les riches, évidemment), traitées comme des objets (le « grab them by the pussy » a laissé des traces) ou des punching-balls. La trajectoire de Dorothy/Nadine, combattante infatigable presque fantasmée qui remet les hommes à leur juste place, est évidemment à prendre comme un avertissement : le monde change et le « Minnesota nice » a vécu. Désormais, les coups seront rendus.
Fargo saison 5, dix épisodes, à voir sur Canal+ et MyCanal à partir du 18 janvier.
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