Everything Everywhere All at Once va enfin sortir en France
A24

Les réalisateurs du film le plus fou de l’année nous expliquent pourquoi ils devaient exploser le cadre pour que le projet puisse exister.

C’est un ovni fou sur une mère de famille, Evelyn (Michelle Yeoh), à deux doigts du burn-out, qui se retrouve malgré elle plongée dans le multivers. Alors qu’Everything Everywhere All at Once est en salles depuis hier en France, nous décortiquons dans le numéro de septembre de Première (avec Avatar : La Voie de l’eau en couverture) le film en compagnie de ses réalisateurs, Daniel Kwan et Daniel Scheinert. Et Kwan de nous exposer notamment sa théorie sur l’évolution du cinéma : « Il n’y a plus de “monoculture” désormais. Plus personne ne regarde ou lit la même chose à grande échelle. Le dialogue commun autour d’œuvres qui marquent leur époque – à part peut-être les films Marvel –, c’est fini depuis 2000 ou 2010. L’industrie tente désespérément de retrouver une culture collective. Certains parlent de “cultural fracking” : on fore le passé à la recherche de l’époque où le monde entier se retrouvait sur une même base. D’où l’arrivée massive d’un cinéma méta, très conscient de regarder dans le rétro, construit sur les cendres de sa propre gloire. On remake Top Gun, on refait encore et encore des films Batman. Parce que les idées neuves, les nouvelles histoires, n’arriveront jamais à rassembler autant que les anciennes. Plus personne ne veut prendre le risque de la nouveauté. On essaie d’évoquer le sujet à notre modeste échelle, mais le pied de nez ultime, c’est Lana Wachowski, forcée de tourner Matrix 4 – le film se serait fait avec ou sans elle – et qui lance un doigt d’honneur monumental à ce processus de reboot de sa propre œuvre. »

Everything Everywhere All at Once, le vrai multiverse of madness [critique]

Par ailleurs, les « Daniels » (leur petit surnom) s’emparent du concept de multivers pour le transformer en outil narratif surpuissant, capable d’ausculter les failles et les actes manqués de leurs personnages. Une façon, aussi, de placer toutes leurs obsessions dans le même métrage. « Ça nous permettait de mettre côte à côte, dans le même film, des choses a priori contradictoires », analyse Kwan. « Et on a écumé un paquet d’idées qui n’ont pas vu le jour. Disons que le multivers était un récipient vraiment marrant et pratique, mais parfois trop grand . Ça pouvait devenir n’importe quoi. Pour autant, le concept nous poussait à dépasser les limites. » Daniel Scheinert : « On savait qu’on ne s’autoriserait à faire ce film que si on explorait des territoires existentiels totalement absurdes, sinon… » Kwan le coupe, sourire aux lèvres : « On aurait eu l’impression de faire un film Marvel. (Rires.) On s’en serait voulu de ne pas aller assez loin . »

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