Rencontre avec la réalisatrice du nouveau film Marvel avec Scarlett Johansson.
Pourquoi une cinéaste indé (Le Saut périlleux, Lore, Berlin Syndrome…) décide-t-elle soudainement de travailler pour Marvel ? Comment faire revivre un personnage mort ? Éléments de réponse avec Cate Shortland, réalisatrice de Black Widow, qui revient sur le passé de Natasha Romanoff et sera le dernier film Marvel de Scarlett Johansson.
Les personnages d’abord
« Je n’étais pas attirée par les films de super-héros. Je n’avais même pas regardé un seul film Marvel avant de faire Black Widow. Mais ils sont venus me voir en Australie et mon intérêt a été piqué quand j’ai entendu parler du personnage de Natasha Romanoff. Puis, j’ai discuté avec Scarlett Johansson, et il a tout de suite été évident qu’on voulait faire un film vraiment centré sur Natasha. On était d’accord : mon credo en tant que réalisatrice, c’est d’imaginer quelque chose de très fort visuellement, avec des personnages vraiment développés. Après, il fallait allier ça au côté grand spectacle d’un film Marvel. »
Pas de fétichisme
« Quand j’ai enfin regardé les films dans lesquels Natasha apparaît, j’ai trouvé qu’elle était une sorte de fantasme masculin. Comme restreinte par les autres : on attendait d’elle qu’elle se comporte d’une certaine façon. Elle portait un masque. Donc l’enjeu était de lui retirer. Par exemple, il y a une scène dans Black Widow où elle est totalement seule. Une femme normale, en train de se boire une bière. Rien d’autre. Je trouve ça beau de prendre le temps de faire une scène comme ça dans un film de cette ampleur. »
À la vie, à la mort
« On sait déjà que Natasha va mourir dans Avengers : Endgame. Et ce sont les adieux de Scarlett Johansson à ce rôle. C’était émouvant et en même temps Scarlett dit que c’était une libération, parce qu’on n’avait pas à s’occuper de teaser la suite. Après… On voulait une vraie conclusion, mais en même temps les fins des films Marvel sont toujours ouvertes. Donc on devait faire les deux à la fois. Évidemment, dans le film, elle est toujours vivante. Mais on sait. Il y a quelque chose d’un peu mystique, comme si son souvenir était toujours présent, et que son esprit continuait d’exister à travers d’autres personnages. »
Piquer les bonnes idées chez les autres
« Avant de tourner, j’ai revu des films avec des protagonistes féminins, vraiment fort mais aussi vulnérables, comme Aliens, le retour ou Le Silence des Agneaux. J’ai aussi beaucoup regardé de films des frères Coen : ils arrivent à créer une tension incroyable en étirant les scènes. On imagine ce qui va se passer, on le sait presque, mais ils te font attendre. Je pense aussi à Dragons et Moulin Rouge, parce que je voulais du spectacle. Il y a une scène dans la neige qui est directement inspirée par Moulin Rouge. »
Redéfinir l’action
« Les personnages bulldozers, ça ne m’intéresse pas. Je m’ennuie souvent quand je regarde des gens se taper dessus. Parce que la plupart du temps, dans les films avec d’énormes scènes d’action, tout est si prévisible que tu pourrais très bien te lever de ton canapé, lancer une café et revenir sans que ça ne pose aucun problème de compréhension. Donc même dans ces scènes, je veux ouvrir la porte à l’inattendu. Et comme Natasha n’a pas de pouvoirs, je n’avais pas de béquille : ça m’a obligée à faire encore plus marcher mon imagination. Il fallait que le public se sente investi dans son combat. »
Black Widow, le 7 juillet au cinéma.
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