- Première
Il semble n’y avoir ni lieu, ni époque. Il y a simplement une usine de briques, posée sur le désert iranien, avec ses travailleurs et son patron. Les dominés et le dominant. La lutte des classes, tout bonnement. Mais l’usine, accablée par les difficultés financières, s’apprête à fermer. L’Iranien Ahmad Bahrami (The Wastetown, sorti cet été) filme les travailleurs, recroquevillés, abattus, qui font tour à tour face au puissant, enfermé dans sa tour d’ivoire. Le cinéaste simplifie le dispositif, répète ses scènes à l’envi, use du noir et blanc, ajoute des visages de drame, des corps fragiles et impuissants, des patriarches de vertu, un amour caché. Et élève son film au rang de fable poétique. Se joue-là, mieux qu’ailleurs, le drame du capitalisme : le dénuement et le délitement de la communauté. C’est à la fois émacié et magistral.
Estelle Aubin