Première
par Frédéric Foubert
Après le triomphe d’Adieu les cons, qui marquait pour lui une forme d’aboutissement artistique, Albert Dupontel ne change pas de braquet, ni de registre, et revient avec une nouvelle fable speedée et sentimentale. Une traversée en roue libre de la France déprimée et éco-anxieuse des années 2020. Le ton est cette fois-ci encore plus ouvertement politique que dans le précédent film, puisqu’il est question d’un candidat à la présidentielle (Dupontel lui-même), qui cache des secrets explosifs sous ses allures de banquier robotique à la Macron – secrets sur lesquels enquête la journaliste d’une chaîne d’infos en continu (Cécile de France). L’intrigue (qu’on ne peut pas trop déflorer) ressemble à un mix entre deux fables politiques de la fin des seventies, La Gueule de l’autre de Pierre Tchernia et Bienvenue Mister Chance de Hal Ashby. Armé de ces influences, à la fois poétiques et déconnantes, Dupontel entend opposer son idéalisme rêveur au cynisme de l’époque. Mais son discours utopique se perd dans les méandres d’un récit moins rocambolesque que laborieux. Au cours du film, l'acteur-réalisateur se retrouve face à sa propre image, dédoublé (on ne dira pas comment, ni pourquoi), comme s’il était écartelé entre son lui « institutionnel » (celui qui gagne des César et fait des millions d'entrées) et l’anar rebelle qu’il entend malgré tout rester. C’est la face secrète du film, l’expression d’une inquiétude fondamentale. Un dilemme intéressant, mais exprimé dans une forme brouillonne. On a beau avoir deux Dupontel pour le prix d’un, le film n’est qu’à moitié satisfaisant.