Première
par Frédéric Foubert
Pastorale Américaine, le roman de Philip Roth, est l’un des monolithes de la littérature contemporaine, une fresque polysémique, un totem mystérieux ouvert à toutes les interprétations. L’histoire d’un Américain modèle, vivant dans le New Jersey prospère de l’après-Seconde Guerre mondiale, et qui va voir son monde s’effondrer après la mort de JFK et l’engagement US au Vietnam, au moment où des bombes explosent dans tout le pays et où sa propre fille s’engage dans la voie de la contestation radicale. Un roman qui a sans doute pris un sens nouveau aujourd’hui (il date de 1997), à l’heure où des parents déboussolés regardent leurs enfants partir faire le Jihad en Syrie… Pour sa première réalisation, Ewan McGregor a donc décidé de s’attaquer à ce mastodonte. Tranquille. Il s’offre le beau rôle (celui du super papa), et s’invite dans quasiment tous les plans – manière de dire qu’il a été obligé de passer derrière la caméra pour avoir enfin quelque chose d’intéressant à se mettre sous la dent en tant qu’acteur. Le résultat ressemble à un téléfilm de luxe, très carré, très propre, très sage, pas désagréable mais jamais dérangeant, tirant la prose de Roth vers une lecture assez réactionnaire et univoque. Mais cette dimension réactionnaire était d’une certaine manière contenue dans le livre. L’interprétation qu’en fait McGregor n’est donc pas totalement hors-sujet, juste un peu simpliste.