Révélée à 17 ans par L'Amant de Jean-Jacques Annaud, l'actrice britannique est retombée dans l'anonymat aussi vite qu'elle avait pris la lumière. Où en est-elle aujourd'hui ?
Il existe de nombreux artistes qui connaissent un immense succès pendant une courte période. Ce succès peut se caractériser par exemple par quelques films qui ont triomphé à une certaine époque, une couverture médiatique énorme à un moment donné, ou un Oscar de la meilleure actrice pour un rôle isolé. Et puis soudain, plus rien (ou presque), ces artistes tombent subitement dans l'oubli et l'anonymat aussi vite qu'ils ont attiré la lumière. Ils disparaissent de l'écran radar sans rien laisser d'autres que des souvenirs plein la tête, des souvenirs nostalgiques de cinéphiles.
Parfois dû à un retrait choisi, tout simplement pour changer de vie, élever des enfants, ou évoluer vers d'autres sphères. Ou à l'opposé, ce retrait peut être provoqué à cause du vieillissement, du temps qui passe, et donc, du manque d'intérêt des studios et des productions. Ces disparitions soudaines sont d'autant plus surprenantes qu'elles se développent d'une façon exponentielle avec le temps. En effet, aujourd'hui, combien de Mary Elizabeth Mastrantonio, de Meg Ryan, ou de Rebecca de Mornay presque oubliées pour une Meryl Streep toujours au sommet ? Une carrière est un travail de longue haleine, un investissement perpétuel. Et il faut compter sur une bonne dose de chance aussi.
A travers cette rubrique baptisée "Mais qu'est devenu(e)... ?", nous vous proposons régulièrement de vous replonger dans une époque, une période, une filmographie, une histoire. Celle d'un comédien ou d'une actrice qui aura marqué le septième art de son empreinte avant de disparaître aussi vite qu'il ou qu'elle était venu(e).
Mais qu'est devenue... Jane March ?
Jane. March. Deux mots qui parviennent en un dixième de seconde à mettre n'importe quel cinéphile en émoi. A peine la deuxième syllabe prononcée que nous voilà déjà plongés en Indochine. Un léger vent caresse nos cheveux. Et l'on distingue alors de plus en plus net, au bout d'un ponton, une silhouette frêle et chapeautée. Une silhouette fine et divine qui allait bientôt s’offrir à nous. Et alors des images explosent dans notre mémoire tels les pétales d'une rose arrivée à maturité.
Jane March possède ce pouvoir. Il n'aura en effet fallu qu'un film - L'Amant de Jean-Jacques Annaud adapté de Marguerite Duras - pour que la jeune actrice britannique de 17 ans à l'époque entre définitivement dans nos vies.
Née le 20 mars 1973, à Londres, d'un père anglais et d'une mère vietnamienne, la jeune femme n'est pas majeure quand Jean-Jacques Annaud lui propose le premier rôle de son nouveau film, après que le réalisateur français l'eut remarquée en couverture du magazine pour ados Just Seventeen quelques mois plus tôt.
Premier film pour Jane, et coup de maître immédiat, tant la jeune comédienne anglaise irradie de toute sa grâce ce film sensuel à la beauté sauvage, au côté du séduisant Tony Leung Ka-fai.
Pendant deux heures, les souvenirs du premier amour de Margueritte Duras - et sa découverte du sexe - se succèdent devant nos yeux grâce à la magnifique actrice, dévoilant son corps passionnée à chaque séquence, imposant son jeu subtil à chaque plan, sa fragilité enivrante, et nous abreuvant de sa présence charnelle inoubliable.
A 18 ans - au moment de sa sortie sur les écrans - et en un seul film - véritable coup d'éclat -, Jane était en place.
Et malgré s'être définitivement embrouillée avec Jean-Jacques Annaud - elle lui a reproché de faire la promo du film en surfant sur les (fausses) rumeurs qui voulaient que Jane et Tony aient vraiment fait l'amour lors des scènes de sexe -, sa carrière est lancée.
Malheureusement, par la suite, le conte de fée n'allait pas durer. Propulsée sexystar pour avoir passé les trois quarts de L'Amant dans le plus simple appareil (alors qu'en fait Annaud avait fait appel à cinq doublures pour les scènes les plus chaudes), la jeune et jolie Jane se voit alors proposer uniquement des séries B où il est plus question de son appréciable plastique que de scénarios de qualité.
Même si elle n'est pas motivée à l'idée d'être fichée ainsi, elle se laisse cependant tenter par l'aventure Color of Night en 1994, thriller sexy avec Bruce Willis qui veut surfer sur la vague initiée par Basic Instinct et cette nouvelle mouvance des polars érotiques.
Manque de chance pour la jolie brune, le réalisateur Richard Rush est un tâcheron et cette pseudo enquête psychologique et sulfureuse n'arrive pas à la cheville du film de Paul Verhoeven, malgré quelques scènes cultes d'absurdité, comme le déguisement grotesque de Jane (lorsqu'elle incarne un patient masculin lors d'une thérapie de groupe), et bien sûr, la séquence de la piscine avec en cadeau bonux un plan furtif sur le zgeg de Mister Willis.
Elle dira plus tard à propos du film : "Je n'aimais pas du tout le script, mais vraiment pas du tout. En plus, je n'étais pas à l'aise avec la nudité du film qui est tout simplement gratuite. Cependant, il y avait Bruce Willis, je ne pouvais pas refuser."
Ce projet sans ambition (si ce n'est celui d'accumuler des billets verts) permet au moins à Jane de faire la connaissance de Carmine Zozzora, milliardaire hollywoodien et coproducteur du film qu'elle épouse avant la fin du tournage avec Bruce Willis et Demi Moore comme témoins.
Devenue femme au foyer d'un des plus prolifiques et riches producteurs du moment (Le Dernier Samaritain, Une journée en Enfer), Jane ne montre plus son joli minois qu'à de rares occasions, comme en 1996 pour l'inédit Never Ever de Charles Finch avec aussi Sandrine Bonnaire, ou le très raté Tarzan et la Cité Perdue pour lequel Jane incarne.. Jane au côté du musculeux Casper Van Dien (Tarzan).
En 2001, Jane March divorce de son milliardaire et écume à nouveau les castings. Elle n'a que 28 ans, un film culte derrière elle, et pense qu'elle n'aura pas trop de difficultés à trouver du boulot. Elle pense mal. Car ce ne sont en effet que des téléfilms sans saveur qu'on lui propose - et qu'elle accepte - comme l'affligeant Dark Prince : The true story of Dracula (2001), ou Le Sang des Vikings (2003).
Après avoir mangé de la vache enragée pendant quelques années - malgré une confortable rente de son ex-mari -, on la retrouve enfin sur grand écran en 2010 dans un tout petit rôle (celui d'Hestia) dans le remake du Choc des Titans, aux côtés de Sam Worthington, Liam Neeson et Ralph Fiennes.
près une nouvelle série B tournée en 2013 pour la télévision - G-War : La Guerre des Géant, adaptation de Jack et le chasseur de géant -, Jane tente aujourd'hui un énième retour au premier plan avec la comédie Party Pieces, un long métrage en développement avec à son casting des personnalités aussi distinguées que Bai Ling et Carmen Lecetra. Pas sûr qu'avec un tel projet (sur le papier tout du moins), Jane retrouve rapidement la lumière.
À aujourd'hui 42 ans, Jane n'est donc pas encore prête à réaliser le come-back que tous ses fans attendent impatiemment. Mais comme on dit : tant que l'envie est là.
Alors ne désespérons pas, et peut-être qu'un jour, un cinéaste de qualité aura le désir de l'enrôler à nouveau pour camper un personnage tout aussi mythique que dans son premier film, il y a déjà près d'un quart de siècle.
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