Même dans Django Unchained, sorti en France il y a tout juste 10 ans, et dont le cinéaste avait raconté la genèse dans première.
Django Unchained est sorti il y a dix ans en France. Quelques mois plus tôt, en septembre 2012, les acteurs principaux du western de Quentin Tarantino avaient fait la une de Première (Leonardo DiCaprio, Jamie Foxx et Christoph Waltz étaient en couverture du n°427) et le cinéaste s'était confié au sein d'un dossier spécial consacré au film. Quand nous l'avions rencontré sur le tournage, Quentin Tarantino se disait « artistiquement à son apogée ». « Tout ce que j'ai fait jusqu'à maintenant m'a amené à ce niveau d'assurance, de compétence et d'ambition. Django Unchained est mon nouvel Everest ». Comment l'a-t-il gravi ?
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Le choix de la musique
« C’est un rituel important chez moi, un long processus qui commence avant que j’aie rédigé une seule ligne de scénario et se poursuit jusqu’aux dernières heures du montage. En premier lieu, je pense à une histoire que j’aimerais raconter. Puis je me plonge dans ma collection de disques et de musiques de films en essayant de trouver le ciment qui fera tenir ensemble les briques de la maison que je m’apprête à construire. Avec de la chance, je déniche assez vite ce qui deviendra la bande-son du générique d’ouverture. À ce moment-là, je suis tellement excité que je décide d’engager trois ans de ma vie dans le projet... Le score, la musique “extradiégétique”, c’est ma responsabilité, et je choisis ce que je veux. Je ne me suis jamais inquiété de savoir si tel ou tel morceau était anachronique ou pas. Évidemment, Django ne va pas débarquer dans une afternoon tea party et passer du James Brown sur un vieux Sonophone. Mais moi, Quentin, je peux mettre du James Brown sur cette scène si j’en ai envie. »
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Le mélange des genres
« À l’origine, Django Unchained s’inspire du western spaghetti, ou macaroni western, comme on l’appelle au Japon. D’autres références affleurent au fur et à mesure, empruntées notamment aux films de vengeance, mais d’une manière qui, même pour moi, est très inhabituelle, vous verrez. Il y a aussi des touches de westerns américains et de westerns blacks comme Buck et son complice ou Boss Nigger. Et pour ne rien vous cacher, Django renvoie directement, d’un point de vue thématique, à L’Anneau du Nibelung, de Richard Wagner. Il possède cette dimension opératique. Dans le film, Christoph Waltz reconnaît en Jamie Foxx un véritable Siegfried (personnage de la “Tétralogie” de Wagner) et lui dit : « Quand un Allemand croise un Siegfried dans la vraie vie, ce n’est pas rien ! »
Le droit de rire
« Je ne peux pas m’empêcher de mettre de l’humour dans mon cinéma, je ne sais pas faire autrement. J’aime que mes films soient drôles quand ils doivent l’être et que soudain ils ne le soient plus du tout. J’adore manipuler le public dans ce sens, c’est mon grand kif. Comédie, comédie, comédie... Stop, on ne rit plus ! Je tire une grande fierté de cette capacité à pouvoir faire marrer les gens avec des choses complètement tordues. Un rire étrange, contrebandier : “Mince, est-ce que j’ai vraiment le droit de rire, là ?” Django Unchained regorge de ce genre de moments. »
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Ni lois ni règles
« Je ne suis plus le cinéaste que j’étais quand j’ai débuté. J’ai atteint une nouvelle étape dans ma carrière et je sais que mes films s’en ressentent. Aujourd’hui, lorsque je rédige un scénario, j’écris un long roman évolutif sans lois ni règles. Depuis Kill Bill, je sais comment organiser mes scripts, comment les couper et les modifier à mesure que j’avance. Je vois ce qui est important et ce qui ne l’est pas, j’adapte constamment. Ça n’a plus rien à voir avec la méthode utilisée sur Reservoir Dogs, Pulp Fiction et Jackie Brown – à l’époque, j’écrivais un scénario et je passais mes journées à le tourner scrupuleusement. Django Unchained est très proche d’Inglourious Basterds, ce sont deux films compagnons réalisés par le même cinéaste arrivé à maturité. Il y a une trilogie en puissance derrière tout ça, mais je ne sais pas encore quel en sera le troisième volet. D’ici là, je crois que pour mon prochain long, je vais revenir à un plus petit canevas, à une histoire cool et compacte comme avant. Je vais même peut-être me remettre au polar... »
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Construire son héritage
« Tous mes films sont douloureusement personnels. Les gens qui me connaissent le savent. Si dans trente ans, un gamin qui ignore tout de mon cinéma aime l’un de mes films et décide de se familiariser avec mon oeuvre, je veux m’assurer qu’il ne soit pas déçu en regardant le suivant. Je veux être sûr qu’il me reconnaisse. Pour moi, ça se résume à une filmographie solide et cohérente. »
Propos recueillis par Benjamin Rozovas
L'histoire de Django Unchained : Dans le sud des États-Unis, deux ans avant la guerre de Sécession, le Dr King Schultz, un chasseur de primes allemand, fait l’acquisition de Django, un esclave qui peut l’aider à traquer les frères Brittle, les meurtriers qu’il recherche. Schultz promet à Django de lui rendre sa liberté lorsqu’il aura capturé les Brittle – morts ou vifs.Alors que les deux hommes pistent les dangereux criminels, Django n’oublie pas que son seul but est de retrouver Broomhilda, sa femme, dont il fut séparé à cause du commerce des esclaves…Lorsque Django et Schultz arrivent dans l’immense plantation du puissant Calvin Candie, ils éveillent les soupçons de Stephen, un esclave qui sert Candie et a toute sa confiance. Le moindre de leurs mouvements est désormais épié par une dangereuse organisation de plus en plus proche… Si Django et Schultz veulent espérer s’enfuir avec Broomhilda, ils vont devoir choisir entre l’indépendance et la solidarité, entre le sacrifice et la survie…
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