Close de Lukas Dhont
Menuet-Diaphana Films-Topkapi Films-Versus Production

Le réalisateur belge réussit son entrée en compétition avec cette histoire d'amitié entre deux gamins de 13 ans, brisée par une tragédie

Ce jeudi, avant- dernier jour de la compétition cannoise, fut une journée riche en émotions, comme pouvaient en témoigner les yeux rougis de festivaliers ayant enchaîné le sublime Les Bonnes étoiles de Kore- Eda Hirokazu, plus que jamais candidat à une deuxième Palme et ce Close qui marque les premiers pas dans la compétition cannoise du réalisateur de Girl, couronné de la Caméra d’Or en 2018.

Plus de dix minutes de standing ovation enthousiaste ont suivi l’ultime plan de l’histoire de cette amitié fusionnelle entre deux gamins, brisée par une tragédie. Dhont y prouve une fois encore son aisance sur le terrain du mélo pudique, conscient que la force émotionnelle de l’épreuve vécue par l’ensemble de ses personnages serait trahie par toute dérive larmoyante. Le cinéaste installe ici très vite le lien qui unit depuis toujours ou presque ces deux mômes de 13 ans. Une amitié fusionnelle et très tactile qui, au moment de la sortie de l’enfance pour entrer dans les heures tumultueuses de l’adolescence, leur vaut d’être pointés du doigt par certains de leurs petits camarades. Les mots « pédale » ou « tapette » commencent à fuser en classe ou dans la cour de récréation. Pas dans la bouche de tous – nombreux sont ceux qui, à l’inverse, prennent leur défense – mais suffisamment pour commencer à créer une distance entre eux deux. Léo s’éloigne et Rémi ne comprend pas, souffre, enrage, explose, avant de ne plus supporter de vivre, comme si on lui avait brutalement enlevé son oxygène. Close devient alors un film sur la culpabilité de celui qui reste et du chemin de croix à emprunter pour parvenir à se l’avouer puis à l’avouer aux autres. Dhont joue ici des ellipses pour ne jamais verser dans l’insoutenable, quitte parfois à retenir un peu trop artificiellement les chevaux. Et comme il l’avait fait avec Victor Polster dans Girl, il révèle deux jeunes comédiens saisissants de justesse, Eden Dambrine et Gustav de Waele, aux côtés notamment, dans le rôle de la mère de Rémi, d’Emilie Dequenne, une fois encore impériale dans ce registre ultra- émotionnel.

Dhont explique avoir mis du temps à enchaîner après le succès international de Girl, à trouver l’inspiration pour ne pas bégayer tout en restant fidèle à ce qu’il est. A son envie de parler de l’enfant et l’adolescent qu’il fut, des souffrances qu’il a pu traverser pour aider les enfants et aux adolescents d’aujourd’hui confrontés à des situations identiques à se sentir moins seuls dans leurs différences. Et plutôt que des beaux mais vains discours, il fait des films à fleur de peau, déployant une intensité physique évoquant parfois le travail d’un Xavier Dolan. Le cap toujours délicat du deuxième long est en tout cas ici franchi non sans superbe.