Première
par Thomas Agnelli
Une lycéenne en quête d’ailleurs rencontre un garçon tombé du ciel. Ce dernier lui fait découvrir des contes immoraux. Envoûtée, elle le suit dans son univers. On est assez heureux que le réalisateur des Chansons d’amour – qui est aussi celui du sulfureux Ma mère – ose creuser ce qu’il y a de licencieux et de théorique dans son art. Son drôle de chant d’amour transgenre, dans lequel un double masculin de Shéhérazade perd une belle endormie dans ses histoires, ressemble à une divagation d’étudiante en philo. Le cinéaste y rappelle la nécessité du rêve, opposant un monde ancien fantastique et ouvert aux transgressions à notre univers urbain uniforme ne tolérant plus la fantasmagorie ni l’utopie. Certes, si l’on est conscient de la prise de risque, Christophe Honoré se mesure cependant à plus grands que lui. On pense beaucoup au climat onirique des "Mille et Une Nuits" de Pasolini, au surréalisme uchronique du Buñuel de "La Voie lactée", au réalisme magique de Cocteau... Mais le texte d’Ovide demeure beau malgré tout, même psalmodié par des comédiens nus. Et l’humour incongru, le goût des oxymores ou le plaisir à filmer des corps mutants donnent lieu à des visions vraiment poétiques. C’est le principal.