Pour ne pas sombrer dans la caricature d'elle-même, la super-série trash évolue (un peu) dans une nouvelle saison plus politique. Le créateur Eric Kripke assume et nous explique tout.
Un pénis géant qui explose ! Le premier épisode de la saison 3 avait frappé fort. Dans une séquence improbable devenue culte, Termite - parodie de Ant-Man - réduisait son amant en miettes, littéralement, après s'être infiltré dans son urètre pour provoquer le plus intense des orgasmes. Alors le début de saison 4 de The Boys, prévu cette semaine sur Prime Video, peut-il faire encore plus subversif ? Plus sanglant ? Absolument pas. Et c'est volontaire.
"Je crois qui si vous essayez de faire plus gros, encore et encore, vous finissez par exploser comme un ballon de baudruche".
Eric Kripke explique à Première pourquoi les nouveaux épisodes semblent un peu moins déments, voire même un peu moins spectaculaires. "Si ça devient trop gros, ça devient ridicule. Si vous essayez de faire plus gros, encore et encore, vous finissez par exploser comme un ballon de baudruche", analyse le showrunner et créateur. "On a donc choisi de se concentrer davantage sur les personnages, de creuser leur psychologie, de proposer des choses nouvelles aux spectateurs". Lui qui adapte depuis cinq ans le comics de Garth Ennis et Darick Robertson admet avoir une peur permanente de la caricature. "Ça me terrifie, vous voulez dire ! C'est pour ça qu'on passe autant de temps à écrire des scènes émotionnelles, centrées sur les personnages. Si ces scènes ne marchent pas, alors on bascule dans la parodie. Si nos personnages n'ont pas l'air réels, si l'on ne peut pas s'identifier à eux, alors on est dans la farce." Et le scénariste d'expliquer qu'il n'envisage jamais la série en termes de choc :
"On ne peut pas toujours aller plus loin dans le trash. Parce que ça ne tient pas la distance. On ne peut pas maintenir ce genre de vision à long terme".
Concrètement, si les premiers épisodes de la saison 4 de The Boys comptent leur habituel lot de séquences hallucinantes et autres gens qui explosent en repeignant les murs, elle prend surtout une étonnante tournure politique. Assez inévitable, parce que l'élection présidentielle est le fil rouge de la saison et qu'une Supe est désormais aux portes de la Maison Blanche, avec Victoria Newman, soutenue par Homelander.
Mais Eric Kripke en profite pour tirer le signal d'alarme, entre les lignes, auprès du public américain appelé aux urnes dans la vraie vie en novembre : "L'écriture de la saison 4 a débuté juste après les événements du 6 janvier (l'assaut du Capitole à Washington par des militants pro-Trump). J'ai été très marqué par ça comme beaucoup de monde aux Etats-Unis. Alors cette série pose clairement ce message : si un homme puissant se dresse devant vous et annonce qu'il va sauver le monde, il vous ment ! Il vous manipule ! J'aimerais que les gens soient un peu plus conscients du fait qu'ils sont manipulés constamment par les réseaux sociaux, par les algorithmes, par les super-machos qui prétendent être des héros au-dessus de la mêlée."
La nouvelle Supe qui manipule les réseaux sociaux
Une manipulation des masses qui prend toute sa place dans les intrigues de la saison 4, avec l'entrée en scène de Firecracker (jouée par Valorie Curry), une nouvelle Supe populiste et conspirationniste, qui joue aussi bien avec le feu... qu'avec les réseaux sociaux.
Eric Kripke dénonce. Mais ce Démocrate assumé ne se fait guère d'illusion sur l'impact que ses Boys pourraient réellement avoir sur le corps électoral de l'oncle Sam en cette année présidentielle, qui risque de voir Donald Trump revenir aux affaires. "Je sais que je ne suis qu'un artiste, un saltimbanque libéral. Mais si une seule personne regarde ses dirigeants de manière plus critique après ça, ce serait une victoire ! Ce serait génial si l'on pouvait ainsi faire bouger les mentalités. Maintenant, je n'ai pas vraiment cette ambition là" avoue-t-il.
Homelander... à quoi bon ?
Alors en attendant, The Boys s'amuse du surhomme en faisant passer Homelander par mille maux psychologiques. Dans la saison 4, le plus fort d'entre tous est directement confronté à sa propre mortalité. Homelander a des cheveux blancs. Il comprend qu'il n'est pas un Dieu : "Oui, il vieillit et c'est très dur pour lui, parce qu'il déteste tout ce qui est humain dans le fond. Il hait la partie humaine qui est en lui, celle qui n'en finit plus de ressortir. Et ça, ça le rend fou. Il a besoin d'amour et il ne comprend pas pourquoi."
Alors à quoi lui sert cette toute puissance finalement ? À quoi bon dominer les Hommes ? "Effectivement, on écrit volontairement sur ce vide qui l'angoisse" insiste Kripke. "On pose la question tout le temps : quel est son but ultime ? En réalité, il n'en a pas. Il n'y a pas de finalité satisfaisante à ce qu'il fait, parce que ce n'est pas ça qui va le rendre heureux. Il a voulu prendre le contrôle de Vought et ça ne l'a pas rendu heureux. Il se rapproche du pouvoir politique et ça ne le rend pas plus heureux. Et après, il passera à autre chose et cela n'y fera rien. Parce que ce personnage est un puit sans fond. C'est un trou noir de tristesse. Rien ne le rendra heureux." The Boys face à l'âge de raison ?
The Boys, saison 4, à voir sur Prime Video à partir du jeudi 13 juin 2024.
Commentaires